Ce silence mérite d’être analysé car il recouvre de nombreux espaces délaissés ou maltraités par le débat français. Comme souvent, les questions ethniques sont les plus délicates à manier car elles frappent au cœur notre société dans ses zones d’ombres et ses non-dits.
En France aussi, les minorités ethniques subissent tous les jours une discrimination au faciès sous prétexte de traquer la « boulette », un état de fait confirmé par notre mascotte nationale, Eric Zemmour.
Les minorités, principales victimes de la guerre à la drogue
Si l’on prend la peine d’étudier l’argumentation antiprohibitioniste américaine, on s’aperçoit que son architecture s’adapte parfaitement au logiciel antidiscriminatoire utilisé habituellement par les minorités :
– les minorités ethniques sont les principales victimes de la prohibition car « le pouvoir blanc » utilise le prétexte de lutte contre la drogue pour contrôler les populations considérées comme anxiogènes et à vocation carcérale depuis l’esclavage,
– la guerre à la drogue se déroule principalement sur le territoire des minorités qui doivent gérer à la fois le champ de ruines laissé par les guerres de gangs, et les ravages dus à l’abus de substances très toxiques,
– une autre dérive raciste de la prohibition est évoquée dans une tirade célèbre du film de Steven Soderbergh, Traffic. Contrairement aux stéréotypes véhiculés par les médias, les drogues sont principalement consommées par des blancs de la middle-class dont le pouvoir d’achat est la hauteur des tarifs « prohibitifs » appliqués aux substances illicites. Mécaniquement, cette demande exponentielle désintègre l’économie et pèse sur le lien social des zones habitées par les noirs ou les latinos déjà fragilisés par la discrimination. […]