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Avril 2013. Il y a quatre ans, le 2 avril 2009, N. Sarkozy, alors président de la République française annonçait, à la sortie du sommet du G20, un accord « au-delà de ce que nous pouvions imaginer ». A. Merkel, alors chancelière d’Allemagne, parlait d’un « compromis très, très bon, presque historique », et M. Obama, président des États-Unis d’Amérique, d’un « tournant ».

"Saisie" - "Marché de l'immobilier" (caricature américaine, octobre 2010)

Ce jour-là, le G20 s’était mis d’accord pour :

1. Restaurer la confiance, la croissance et l’emploi
2. Réparer le système financier pour permettre la reprise du crédit
3. Renforcer la régulation financière pour restaurer la confiance (fonds spéculatifs et paradis fiscaux)
4. Financer et réformer les institutions financières internationales pour surmonter la crise et en empêcher de futures
5. Promouvoir le commerce mondial et l’investissement et rejeter le protectionnisme
6. Construire une reprise complète, écologique et durable

Six commandements qui auguraient, d’après ces vingt chefs d’État, un nouveau capitalisme au fonctionnement différent. 2012 les aura contredits. Car renflouer des institutions financières vieilles de 40 ans pour relancer l’économie du XXIe siècle, et injecter plus de 1 000 milliards de dollars pour réanimer les activités de crédit, puis clamer que c’était là une véritable réforme du capitalisme financiarisé, voilà un mensonge auquel le public a cessé de croire en 2012.

On a cessé d’y croire, le temps qu’on remarque que les bourses s’engluaient de nouveau, comme elles le faisaient la veille de la crise des subprimes. On a cessé d’y croire le temps que les désormais fameux prêts Alt-A (Alternative A-Loans) et options ARM (Adjustable Rate Mortgage) occupent la « une » des journaux.

En décembre 2011, on a commencé à comprendre que les subprimes n’avaient été qu’un avant-goût de l’explosion des emprunts hypothécaires américains. Après la déroute de ces ménages pauvres qui avaient emprunté pour s’acheter une maison (les subprimes), ce fut au tour des ménages moyens qui avaient emprunté pour s’acheter une maison… au-dessus de leurs moyens, grâce aux options ARM et aux Alt-A.

Voici des termes auxquels on se sera habitué : options ARM et prêts Alt-A. Tout deux sont des prêts hypothécaires à taux d’intérêt modulable pour lesquels de nombreux ménages avaient opté, alors même que les prêts plus traditionnels aux subprimes s’effectuaient encore. Seulement voilà : la différence essentielle était que l’emprunteur pouvait choisir de rembourser son prêt à un taux bas pour une période relativement longue, avant que la banque ne réajustât le taux et ne recalculât le montant des mensualités.

Or cette échéance approche à grands pas pour des centaines de milliers de ménages. Une statistique du Crédit suisse avait mis en évidence une augmentation du montant des remboursements (et donc probablement des défauts de paiement) à venir en 2011.

Il faut penser à ces options comme à des crus. En janvier 2011 déjà, le cru des options ARM contractées en 2004 avait un taux de défaut constant (donc une incapacité à payer pour au moins 60 jours consécutifs) passant de 17,7% à 18.6%. Pour le cru d’options contractées en 2007, le taux de défaut constant à 90 jours avait augmenté de 14% à 14,6% en Janvier 2011 augurant le début d’une augmentation.

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Les prêts Alt-A, en comparaison, sont des crédits donnés à des emprunteurs supposément bons mais dans l’incapacité de fournir toutes les pièces nécessaires pour une application normale.

Une étude de la banque Barclays, en février 2011, indiquait que « la sévérité des pertes sur les options ARM et les prêts Alt-A avait augmenté ». En Mars 2011, l’agence de notation Moody’s révise sa notation des prêts immobiliers américains. Elle baisse d’une valeur de 1,7 milliards de dollars son estimation de la valeur de ceux détenus par la banque JP Morgan Chase. Un seul exemple parmi une série de révisions que l’agence faisait de ses notations. En juin 2011, l’agence de notation Fitch confirme ces peurs en diminuant la note de 2 445 classes de prêts Alt-A.

Et le monde aura donc compris, en 2013, avec le recul, que les paradis fiscaux n’avaient aucunement contribué à la crise et que les fonds spéculatifs étaient loin d’être les seuls coupables, mais que c’étaient bien plutôt les innovateurs des hauts lieux de la finance et des grandes banques privées qui avaient causé leur perte par eux-mêmes. Une crise qui ne fit que commencer en 2007.

En réinjectant 1 000 milliards de dollars de crédit dans un système financier qui continuait à opérer sous les mêmes règles (les siennes…), les gouvernements des vingt pays les plus puissants du monde ont réanimé un système dysfonctionnel — où des titres sans adossement peuvent être émis en quantités colossales, et où le secteur financier d’une économie qui croît de 2 % par an se développe à une vitesse trois fois plus grande, indépendamment de la production réelle des économies nationales. Un secteur qui n’est visiblement plus au service de l’économie réelle.

En avril 2013, peut-être, le monde se rendra compte que tout ce qu’a fait le G20 d’avril 2009, ce fut de remplir d’essence une voiture sans freins.

Les Echos

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