Pour certains médias anglo-saxons, le gouvernement français refuse d’admettre la gravité de la situation économique. Mais, rétorquent des spécialistes, l’Hexagone est à peine mieux lotie que les pays les plus fragiles de la zone euro.
Les marchés financiers et certains médias, surtout anglo-saxons, semblent penser le plus grand mal de la situation économique française. Et les déclarations rassurantes du gouvernement de François Fillon, notamment sur la santé de ses banques, n’y changent rien. Jeudi, le quotidien britannique The Guardian clamait que la France était “en situation de déni par rapport à son économie.”
En fait, le tableau serait bien plus noir que ce que la presse anglo-saxonne suggère en se concentrant sur la France. “Les pays occidentaux dans leur ensemble refusent de regarder les choses en face,” souligne Xavier Timbeau. Conséquence : la zone euro est indécise sur les mesures à prendre et se contenterait de parer au plus pressé en décidant “de foncer dans le mur avec des politiques de restrictions budgétaires,” se désole cet économiste pour qui cette approche conduit tout droit à une récession généralisée.
Le journal rappelle qu’en “trois mois la valeur boursière des principales banques françaises a été divisée par deux.” Pis, “la deuxième puissance économique européenne est plombée par une croissance nulle et une consommation en chute libre.” Face à ce que The Guardian appelle “la pire crise depuis la Seconde Guerre mondiale,” le gouvernement français serait tellement “obnubilé par la prochaine élection présidentielle” qu’il se contenterait de “naviguer à vue avec pour seul objectif de ne pas perdre son fameux AAA,” la meilleure note qu’une agence puisse attribuer à un pays.
Un constat de “déni” que le très sérieux quotidien économique Financial Times avait également dressé il y a une semaine. La “fierté économique française” serait actuellement rudement mise à l’épreuve. Les marchés financiers n’ont plus confiance dans les banques françaises – qui, à en croire le Financial Times, “ont longtemps été considérées comme les fleurons de l’économie française” – et des entreprises, telles que Siemens, vont jusqu’à retirer leur argent de France pour s’abriter sous des cieux plus sûrs…
Tableau encore plus noir
“La France est peut-être en déni par rapport à la gravité de la situation économique actuelle, mais elle n’est pas la seule et n’est probablement pas le pays qui se ment le plus,” assure Xavier Timbeau, directeur du département analyse et prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
L’acharnement sur le système bancaire français relève d’une tentative “de mettre en lumière les problèmes d’un pays pour ne pas évoquer ceux des autres,” estime ce spécialiste. “Vous croyez que si Athènes était en défaut de paiement seules les banques françaises chuteraient ? Si la Grèce faisait faillite se serait un Lehman Brothers puissance 5. Tout le système bancaire européen, au moins, serait mis au tapis,” avance Xavier Timbeau.
Certes, par rapport à l’Allemagne, la croissance française fait grise mine, mais pour Xavier Timbeau, il faut remettre les chiffres dans leur contexte. “L’Allemagne est revenue à son niveau de PIB d’avant la crise, la France est trois points en-dessous, mais le Royaume-Uni en a six de retard et l’Italie dix,” rappelle-t-il.
(Merci à Eurokanner)