Par Charles Sannat, Chargé d’affaires à BNP PARIBAS
Il y a plus d’un an, dans un article intitulé “faudra t-il encore sauver les banques” j’attirais l’attention de tous sur l’aspect inévitable d’un nouveau plan de soutien au secteur financier et bancaire.
Force est de constater qu’après la première intervention des états fin 2008 début 2009, aucune des raisons ayant conduit à cette crise n’avaient été traitées.
En 2011, il arrive ce qui devait arriver. Les banques sont fragiles et manquent cruellement de fonds propres puisqu’elles se sont évertuées sous l’amicale compréhension de nos gouvernants à distribuer en dividendes et bonus ce qu’elles auraient pu conserver sous forme de réserves pour se renforcer. Souvenez-vous des grands titres de la presse financière de l’année dernière! “Record historique de bénéfices pour les Banques,” “Les bonus à nouveau au plus haut.“
Une fois encore, nous assistons à une nationalisation des pertes mais à la privatisation des gains.
Il faut tout de même noter un changement d’envergure par rapport au climat de 2008. Il y a 3 ans nous ne parlions pas ou peu de faillite d’état. Cela restait une hypothèse de travail à peine crédible. Celui qui l’évoquait était très vite taxé de “déclinologue.“
Bref, la réalité actuelle est que les états ne sont tout simplement plus en capacité d’agir et de sauver à nouveau le système bancaire.
La preuve est venu ce week-end de Belgique puisque nos voisins belges sont désormais menacés par Moody’s de dégradation de leur note en raison de leur soutien à DEXIA.
Il est important de rappeler que Dexia est une “petite banque.” La taille de son bilan est d’environ 500 milliards d’euros. En France rien que BNP Paribas a un bilan d’une taille supérieure à 2 000 milliards d’euros! Nos banques sont désormais trop grosses pour être sauvées par les États sans entraîner ceux-ci dans leur chute.
L’accord de principe Franco-allemand d’hier sur la nécessaire recapitalisation des banques achoppe encore sur la meilleure des solutions pour y parvenir ; Merkel et Sarkozy ayant renvoyé les aspects concrets au prochain sommet du G20 dans un mois (en novembre).
Pourquoi une telle absence de solution? Pour une raison finalement assez simple.
Soit les états prennent en charge la recapitalisation de chacune de leur banques respectives. Cela aura pour conséquence quasi mécanique la dégradation, par les agences de notation, de la note des pays concernés. La France ne veut pas de cette solution qui entraînerait une augmentation importante du coût de notre dette puisqu’une dégradation de la note conduit à une augmentation du taux d’intérêt. Donc la dette devient plus chère.
La France souhaiterait faire intervenir le FESF (Fonds européen de stabilité financière). Le FESF emprunterait dans ce cas directement les sommes nécessaires à la BCE (Banque centrale européenne) qui imprimerait le nombre de billets correspondants. De cette solution les allemands ne veulent pas, car faire fonctionner la “planche à billets” est à terme hyper inflationniste. Nos amis d’outre Rhin restent traumatisés par la période d’hyperinflation des années 20 qui avait amenée à l’avènement du nazisme.
Ils n’accepteront cette solution qu’en dernier recours, d’ici un mois par exemple.
Encore une fois, nous n’avons plus le choix des solutions. Il ne reste plus que la monétisation, c’est-à-dire le recours massif à la planche à billet. Cela fera baisser l’euro, et va renchérir le coût de nos importations dans les prochains mois à commencer par le prix du litre d’essence. Mais c’est à ce prix que le système économique et financier pourra continuer à tourner, jusqu’à l’apparition hélas parfaitement prévisible de nouvelles pertes du système bancaire qu’il faudra à nouveau combler.
Les banques ne peuvent pas avouer l’étendue de leurs erreurs. Elles feront tout pour sauvegarder leurs intérêts. Elles cacheront la réalité, encore une fois. Il faudra à nouveau les sauver pour la troisième fois. Sans doute en 2014, lorsque les pertes causées par la future explosion de la bulle immobilière en Europe ne pourront plus être masquée.