Les nouvelles autorités libyennes ont déclaré dimanche que la législation serait fondée sur la loi islamique. L’annonce était attendue, estime l’islamologue Mathieu Guidère, qui écarte à court terme le risque d’une dérive islamiste et y voit plutôt une évolution similaire à l’apparition de partis de la démocratie chrétienne en Europe. Interview.
La Libye prend le chemin d’une démocratie musulmane, tout comme les pays européens sont devenus des démocraties chrétiennes à partir de la fin du XIXème siècle où des partis comme la CDU en Allemagne ou l’UDF en France se réfèrent aux valeurs chrétiennes.
Le président du CNT, Moustapha Abdeljalil, a officialisé le fait que la législation du pays serait fondée sur la charia, la loi islamique. Cela vous surprend-t-il ?
Pas du tout. Le CNT l’avait annoncé dès le mois d’août et ce n’est pas surprenant pour un pays où les gens sont très croyants et où la pratique de l’islam est traditionaliste et rigoriste. […] Surtout, c’est bien l’aile islamiste de l’opposition qui a, majoritairement, libéré Bengazi et Tripoli. Ils étaient en première ligne, ils ont sacrifié leur vie. Il fallait leur donner un signal de reconnaissance fort. […]
Risque-t-on d’assister à une dérive islamiste qui pourrait mettre en danger les aspirations démocratiques en Libye ?
A court terme non. Certes, pendant longtemps, les islamistes libyens voulaient à tout prix instaurer la charia et étaient prêts, comme en Algérie, à recourir à la violence. L’expérience de la guerre civile algérienne des années 90 a calmé tout le monde. […]