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Le politologue Gilles Kepel, mandaté par l’Institut Montaigne, cherche à imposer le sujet des banlieues dans le débat de la présidentielle. Il considère que la banlieue est devenue «le réceptacle du rien social et non plus du lien social».

Le test va avoir lieu en 2012. Y aura-t-il des candidats élus issus des quartiers populaires et de la diversité ? Gardons à l’esprit que les émeutes des Minguettes eurent lieu quatre mois après l’élection de Mitterrand en 1981.

Quel changement vous a sauté aux yeux depuis la parution des « Banlieues de l’islam » [paru il y a vingt-cinq ans] ?

À la question déjà posée voici vingt-cinq ans, «accepteriez-vous une invitation à déjeuner chez un non-musulman», la réponse a massivement été de dire : «D’accord, à condition que j’y mange halal.» En un quart de siècle, le curseur s’est déplacé sur l’insertion communautaire. Cette explosion hallucinante du halal depuis les années 2000 marque une profonde transformation. Il y a quarante ans, la banlieue, c’était du travail et des prolétaires exploités dans des usines. À partir de 1973, ces travailleurs immigrés qui avaient participé à la reconstruction de la France ont été marginalisés pour disparaître de la circulation. […]

Même s’il s’agit d’une enquête sur la banlieue et non pas sur l’islam, cette religion y occupe une place tellement centrale qu’on se demande parfois si la République n’aurait pas intérêt à s’adapter à l’islam plutôt que de chercher à faire l’inverse. Qu’en pensez-vous ?

La religion tient en effet un rôle important dans les quartiers dégradés. On m’a reproché de dire que l’islam n’est qu’une compensation dans la destruction. Cela ne s’y réduit pas, mais c’est très présent. Il y a des manières de pratiquer l’islam qui vont dans le sens d’une socialisation vertueuse, d’autres qui vont dans celui d’une socialisation de rupture. Avec des passages de l’une à l’autre. Cela ne veut pas dire que la République doit s’adapter à l’islam. Car l’islam fait question dans sa représentation globale, à travers la caricature négative ou positive qu’en donnent d’un côté les identitaires ou de l’autre les islamistes. L’enjeu est d’arriver à faire en sorte qu’il y ait une capacité d’adaptation dans les deux sens. […]

Tant que le suffrage universel n’arrivera pas à faire émerger un député de ces minorités visibles, tant qu’il n’y aura pas de banalisation, il ne faudra pas pleurer sur le fait que la socialisation politique se fait ailleurs.

Sud Ouest (Merci à BZHskunki)

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