Fdesouche

Marine Le Pen a présenté jeudi son comité de soutien à la presse. Des anciens fonctionnaires, un avocat célèbre et même un pilote automobile… Mais où se place donc Jean-Marie Le Pen dans tout cela ? Est-il toujours le premier soutien de sa fille ? Interview de Lorrain de Saint Affrique.

“C’est pénible à voir. On l’occupe. On lui fait organiser des animations dans les supermarchés façon Danièle Gilbert. Je pense qu’il est désœuvré. On lui assigne des missions pour lesquelles Marine est censée ne pas pouvoir aller.”

Atlantico : La composition du comité de soutien de Marine Le Pen a été annoncée ce jeudi, avec à sa tête l’avocat Gilbert Collard. Mais qu’en est-il du soutien de Jean-Marie Le Pen ? Il a exprimé certains désaccords sur la stratégie de campagne menée par sa fille. Vous qui les avez fréquentés, savez-vous où en sont leurs rapports ?

Lorrain de Saint Affrique : Sur le plan affectif, ils sont extrêmement liés. Mais la vie politique transforme les êtres. Je pense qu’elle lui est reconnaissante de ne pas avoir dit des choses de nature à compromettre sa candidature. Chaque jour qui passe est sans doute un soulagement pour Marine. […]

D’un point de vue politique, il y a trop d’écart entre eux quant aux capacités intellectuelles et d’incarnation physique d’un message, pour que Jean-Marie Le Pen puisse penser que Marine est meilleure que lui. De son côté, Marine Le Pen n’a pas cherché à éliminer son père des circuits qui attirent l’intérêt sur lui. Ils ont donc trouvé une répartition des rôles réaliste.

Sur la stratégie de campagne c’est très différent […] Jean-Marie Le Pen a toujours affirmé que, quitte à assumer l’étiquette d’extrême droite, il ne fallait pas dévier, c’est-à-dire rester dans le lit de la rivière d’un courant politique éternel. […]

Atlantico : Selon vous, si Jean-Marie Le Pen avait été candidat, aurait-il mené la même campagne que sa fille ?

Lorrain de Saint Affrique : Certainement pas ! […] Jean-Marie Le Pen s’est exprimé plusieurs fois au sujet de la campagne de sa fille. Il semble regretter qu’elle s’éloigne de ce qu’il appelle les “fondamentaux”. Pour lui, cela signifie la perte d’identité du FN. Il pense que sa fille a un talent évident, mais que les changements qu’elle a induits pourraient se traduire par une grande déception dans les urnes. Je ne suis d’ailleurs pas sûr qu’un échec de Marine Le Pen dans les urnes le chagrine tant que cela : il reste malgré tout centré sur lui-même.

Atlantico : Jean-Marie Le Pen présente-t-il un risque pour sa fille du fait de sa liberté d’expression ou un atout pour continuer à attirer l’électorat traditionnel du FN ?

Lorrain de Saint Affrique : Les fonctionnaires du Front national ne sont pas toujours tranquilles de le voir s’exprimer devant les caméras, avec le risque du dérapage de trop qui donnerait à la campagne de Marine une coloration brutale qu’elle ne souhaite pas. C’est pénible à voir. On l’occupe. On lui fait organiser des animations dans les supermarchés façon Danièle Gilbert. Je pense qu’il est désœuvré. On lui assigne des missions pour lesquelles Marine est censée ne pas pouvoir aller. Il faut qu’il accepte cette situation un peu bizarre. Il n’est plus le président du Front national qui subjuguait des foules de 10 000 personnes et portait au bord des larmes des assemblées pétrifiées d’émotion. […]

Atlantico : Jean-Marie Le Pen est-il jaloux du succès de sa fille ? Qu’a-t-il pu penser, par exemple, de la Une de Libération qui indiquait que 30% des Français seraient susceptibles de voter pour elle, un score qu’il n’est jamais parvenu à obtenir ?

Lorrain de Saint Affrique : Je pense qu’en voyant la Une de Libération, il s’est dit qu’on cherchait à faire peur aux gens pour alimenter le vote utile. […]

Atlantico – 03/02/2012

Fdesouche sur les réseaux sociaux