“Tintin est-il de gauche ? Astérix est-il de droite ? ” Et Barbie, pour qui vote-t-elle? En cette période de campagne présidentielle Isabelle Fringuet-Paturle et Jérémy Patinier se sont amusés à trouver le penchant politique de nos héros de BD Tintin et Astérix, de la chanteuse pop Lady Gaga, du constructeur suédois d’ameublement Ikéa, etc ! Extraits (2/2).
Face à eux, les non moins célèbres Romains.
Ces Romains sont les ennemis favoris, voire préférés, desdits Gaulois. C’est contre eux qu’ils résistent sans faiblir et sans renoncer.
À première vue, le débat est simple, d’un côté on a les envahisseurs, que l’on pourrait désigner du terme plus contemporain de colonisateurs, de l’autre les opprimés, les Gaulois.
Ici donc, les Romains. Conquérants, guerriers, hégémoniques, ils annexent les terres qu’ils traversent et y imposent leur style de vie à la romaine : un monde absolutiste et autoritaire où l’ordre, la hiérarchie et l’argent sont rois ; d’ailleurs, les Romains commercent et collectent l’impôt, c’est dire. Ils sont capitalistes, Jacques de Guillebon n’hésite pas à employer le terme de « grand capital gallo-romain » (Astérix l’irréductible, hors-série no 21 du Figaro, octobre 2005). Les Romains sont donc de droite, dis donc.
Là, les Gaulois, des espèces de gauchos, des rebelles frénétiques. Ils s’autogèrent dans la bonne humeur, refusent toute ébauche de capitalisme : ils ne travaillent pas, ils bricolent vaguement, ils vivent de la chasse et de la cueillette, mais juste pour leurs petits besoins et leurs grands festins, pas plus. Ils ne battent pas monnaie et se fichent de la richesse comme de leur premier sesterce. Leur village ressemble à une espèce de communauté sympa et hyper cool où il fait bon vivre, où l’on partage tout et où la vie s’organise avec d’étonnants conseils improbables orchestrés par leur chef, Abraracourcix, et généralement conclus par un banquet maousse où Astérix et ses potes se gavent de sangliers rôtis. (Enfin presque, Obélix… — OUI, on sait !). Quoi d’autre ? Rien. Ah ! si, ils résistent, on l’a dit !
Nicolas Rouvière, le spécialiste d’Astérix, maître de conférences en littérature à l’université Grenoble-I et auteur d’Astérix ou les lumières de la civilisation (éd. PUF, 2006) et d’Astérix ou la parodie des identités (éd. Flammarion 2008), conceptualise le phénomène au poil :
« La valeur principale qui domine [dans le village gaulois] demeure la lutte contre l’impérialisme et la défense des libertés individuelles et collectives face à toute logique d’oppression et d’uniformisation forcée. »
Les Gaulois gauchos ? Okay, mais « chos » comme chauvins, voire carrément xénophobes. Il n’y a qu’à écouter l’ancien Agecanonix quand il dit : « Moi, les étrangers ne me dérangent pas tant qu’ils restent chez eux. » Michel Serres les a carrément taxés d’être « fascistes et semi-nazis » dans une chronique sur France Info (18 septembre 2011). Ce qui a d’ailleurs suscité une sacrée polémique, puis ses excuses auprès des auditeurs offusqués. (…)
Astérix et sa bande sont simplement à l’image des Français (ou le contraire au choix). Ni de gauche, ni de droite, mais à gauche et à droite… (…)