Témoignage de Malama, 30 ans, «française d’origine sénégalaise et musulmane».
Je ne suis pas une menace pour l’identité de la France. Je compose cette identité, je suis cette identité.
Je ne suis pas une victime, mais la société, ma société, me donne des coups.
«Avant, les musulmans vivaient dans des foyers et c’est là-bas qu’on faisait nos prières. On ne gênait personne.» Maintenant, on gêne beaucoup de monde. Ce qui me fait peur c’est le fait de voir qu’en plus de la sphère publique touchée par cet anti-islam, c’est maintenant mon monde, mon quotidien qui, petit à petit, est touché.
Quand certaines personnes apprennent que je suis musulmane, par hasard, à l’occasion du ramadan par exemple, j’ai l’impression qu’on me redécouvre, qu’on me regarde autrement. Limite avec des gros yeux. «Toi, musulmane ? Arrête ! J’aurais pas dit, t’es quelqu’un d’ouvert !» Cela me glace. |…] frères et sœurs, quatre sont pratiquants (personne n’est obligé à rien). Chez moi, on a toujours bossé, qu’on soit pratiquant ou non. Sur mes six frères et sœurs, quatre sont pratiquants (personne n’est obligé à rien).
Comme si l’islam voulait changer la France et son identité. La France, c’est mon pays, et je suis aussi imprégnée de traditions sénégalaises. J’ai grandi dans une petite commune de Bretagne, dans un quartier bétonné. Depuis que j’ai 5 ans, je vais régulièrement au Sénégal.
Chez moi, on parle le soninké et le français. On mange du thiéboudjene, du mafé, du yassa, et de la ratatouille, du hachis parmentier, des quiches… On écoute du mbalax, la musique sénégalaise, et du Gainsbourg. On parle politique française et sénégalaise. Bref, chez moi, on jongle entre deux mondes.
Je ne veux rien. Je ne cherche pas à imposer ma religion, ni même ma vision des choses. […]
Rue 89 (Merci à albator)