Il a pris sa retraite à 58 ans, le jour de l’ouverture de la chasse. Le temps n’était pas mauvais. L’un de ses derniers clients lui a fait la surprise de déboucher une bouteille de champagne à la boutique. Une autre lui est tombée dans les bras en pleurant. C’était il y a tout juste cinq mois, le 25 septembre 2011, après quarante-quatre années de boucherie, et Yves Béguin veut croire que c’est par attachement à sa bonne viande : “Quand je suis parti, les gens ont congelé des paupiettes.”
A Pantin (Seine-Saint-Denis), M. Béguin était le dernier de sa lignée. De celle qu’il appelle, avec son parler fort et son accent natal d’Etricourt (Somme), les “traditionnels”. Comprendre, les bouchers qui ne sont pas “halal”.
Depuis son départ, cette commune de 52 000 habitants de la petite couronne parisienne n’a, pour la viande à la coupe, plus que des boucheries musulmanes. Et à commencer par le maire, Bertrand Kern (PS), qui l’a “obligé à faire un an de plus”, M. Béguin sait que ça en a chagriné plus d’un.