Après l’effacement de dette historique avec ses créanciers privés, Athènes risque d’être obligée de demander aux créanciers publics d’alléger son fardeau.
La diffusion d’un document confidentiel du FMI montre l’étendue du problème : pour que la trajectoire de dette grecque revienne à un niveau soutenable, fixé à 120 % du PIB d’ici 2020, il aurait fallu qu’au moins 95 % des investisseurs participent à l’opération d’échange bouclée jeudi 8 mars. Dès lors, pour un certain nombre de spécialistes, la restructuration historique qui est en cours n’empêchera pas un nouvel effort des créanciers dans quelques années.
« Les estimations de croissance retenues pour la Grèce à moyen terme sont trop optimistes », souligne Jacques Cailloux, chez RBS. Il rappelle que la Troïka, dans son premier rapport, avait par exemple anticipé une contraction de l’activité de 2,6 % en 2011, alors que la réalité risque d’être plus proche de 6 %. « Pour l’avenir, nous prévoyons une croissance de 2,5 % à partir de 2015, alors que la Troïka table sur 4 %. » Autre hypothèse irréaliste selon l’économiste de RBS : la balance primaire (balance budgétaire hors intérêts de la dette). « Le scénario d’un excédent primaire moyen de 4,5 % sur la période 2014-2020 ne tient pas. » Dès lors, pour Jacques Cailloux, sans un nouveau plan d’aide, le niveau d’endettement par rapport au PIB risque d’atteindre 160 % en 2020.
Un risque encore plus important attend Athènes : le risque politique. La colère du peuple grec pourrait se traduire prochainement dans les urnes. Les intentions de vote inquiètent déjà la communauté internationale : le Pasok (le parti actuellement au pouvoir) et son rival Nouvelle Démocratie sont en déclin, alors que les partis des extrêmes font une percée. Les objectifs de rigueur assignés à Athènes pourraient dès lors être sérieusement menacés.
Retour sur les marchés financiers
« Le nouveau plan d’aide de 130 milliards d’euros est censé couvrir complètement les besoins de financement d’Athènes jusqu’à la fin 2014 », rappelle Ioannis Sokos, chez BNP Paribas. « Cela signifie qu’en 2015, la Grèce devra soit bénéficier d’un nouveau programme de soutien, soit emprunter sur les marchés, soit faire défaut et opérer une nouvelle restructuration de sa dette . » Or, à ce jour, aucun analyste ne croit que le pays pourra faire appel aux marchés financiers dès 2015…
Les autres scénarios mettent les créanciers officiels de la Grèce en première ligne. « La dette grecque va passer des mains du privé au public, à savoir le FMI, l’Union européenne, le Fonds de stabilité européen (FESF), et la Banque centrale européenne », explique Ioannis Sokos. Selon lui, en 2015, le FESF aura une créance de 167 milliards d’euros sur Athènes, celle de l’UE et du FMI atteindra 64 milliards. En face, les obligations grecques détenus par les investisseurs, ne représenteront que 62 milliards, soit 18 % de la dette. Selon OpenEurope, un cercle de réflexion britannique, la dette entre les mains des prêteurs officiels va passer de 36 % en ce début d’année à 85 % d’ici 2015 %. Une vraie menace pour les contribuables de la zone euro.