Après les prières de rue, la burqa et la polémique sur la viande halal, Ali Sakri, responsable musulman amiénois, prévient: «Si ça continue», il sortira de sa neutralité électorale. «Jusqu’ici, les musulmans ont gardé un calme exemplaire, en refusant la polémique avec les provocateurs, islamophobes et racistes.» Ali Sakri aurait pu conserver cette ligne de la réserve. Mais voilà, les récents débats de la présidentielle empoisonnés par une succession de petites phrases sur la viande halal ont fait changer d’avis le secrétaire de l’association culturelle et cultuelle des musulmans français de Picardie et par ailleurs responsable de la mosquée Beauvillé à Amiens.
Prières de rue, burqa… «Depuis quelques mois, nous assistons crescendo à une stigmatisation des musulmans. Maintenant ça suffit», dénonce-t-il dans un communiqué, sorti vendredi à la demande de l’association. Assez rare pour être noté, ce texte entend casser quelques idées reçues face «à des candidats à la présidentielle en panne de propositions.»
Mais c’est surtout sur le sujet du halal qu’Ali Sakri insiste. « Les musulmans n’ont jamais exigé que toute la viande distribuée soit halal.» Mais comme le marché est devenu «juteux» (5 milliards d’euros par an), il dépasse désormais les seuls commerçants de la confession pour intéresser la grande distribution. « Le Danemark, la Hollande, la Belgique, l’Irlande l’ont déjà bien compris. Leurs abattoirs, qui ont obtenu le label, ont créé des milliers d’emplois alors que chez nous, nos éleveurs cessent leur activité», explique-t-il.
À défaut, prévient le responsable de la mosquée, alors que «les associations de culte n’ont jamais donné de consignes de vote», cette neutralité pourrait changer. « Si les invectives et la stigmatisation continuent, nous inviterons nos compatriotes à ne pas accorder leur confiance aux candidats qui se montreront hostiles envers nous.»