A l’occasion du Salon de l’érotisme, Grégory Dorcel, PDG du groupe Marc Dorcel, confie à «20 Minutes» ses inquiétudes sur l’évolution du marché de la pornographie…
Chez les Dorcel, le porno est une affaire de famille. Après Marc, c’est son fils Grégory qui a pris la tête du groupe.
Avec 26 millions d’euros de revenus annuels, Marc Dorcel est le premier producteur mondial dans l’industrie de la pornographie.
Face à l’avènement des pureplayers, AdultFriendFinder et ses 350 millions d’euros de chiffre d’affaires ou Manwin, qui détient 50% des plateformes illégales ainsi que les activités télévisuelles de Playboy, Grégory Dorcel fait le pari de la qualité. A contre-courant du marché français du sexe.
Le porno payant avec la crise, c’est fini?
Marc Dorcel a connu 10% de croissance en 2010-2011 mais le marché de la pornographie est une catastrophe. Nous avons multiplié les investissements et les innovations: les magazines, les chaînes de télévision, la 3D, les services multimédia. Nos concurrents ont arrêté les investissements et donc la qualité. La majorité d’entre eux disparaît.
Le sexe reste un produit de consommation qui subit l’impact de la crise et de la baisse du pouvoir d’achat. Mais le facteur crise n’est rien, comparé au piratage. Les sites gratuits sont des sociétés concurrentes très organisées qui volent notre contenu payant et le distribuent soit-disant gratuitement.
Vous sentez que le grand public vous a lâché?
Le grand public prend toujours les sites gratuits pour des Robin des bois. Ces sites sont hébergés dans des paradis fiscaux et ils transforment les visites en argent grâce au trafic converti vers une offre payante. C’est du business mafieux, pas du prosélytisme.
Le problème, c’est que les producteurs n’ont jamais su bien l’expliquer et qu’il a fallu attendre l’affaire MegaUpload pour que le public commence à s’en rendre compte.
Avez-vous des solutions contre le piratage?
La première parade est de sensibiliser le grand public, d’autant que la France est le pays où l’on pirate le plus. Les fournisseurs d’accès à Internet devraient couper l’accès aux sites qui font du business avec du contenu volé. Ensuite, il faut proposer au public les services qu’il attend. Chez Marc Dorcel, nous avons anticipé il y a dix ans en proposant une offre légale en ligne. Nous avons aussi innové en développant aujourd’hui le plus gros catalogue mondial de 3D et les plateformes VOD les plus innovantes. Il faut travailler dans ce sens car sinon, il est logique que les utilisateurs téléchargent si les contenus qu’ils recherchent ne sont pas disponibles légalement.
Je trouve ridicule qu’il faille attendre quatre mois après sa sortie en salle pour pouvoir voir un film en VOD. Chez Marc Dorcel, les films ne sortant pas au cinéma, ils sont disponibles en VOD (vidéo à la demande) dès le premier jour de leur sortie (en DVD). A ce titre, les DVD, qui représentaient 70% de notre chiffre d’affaires il y a six ans, n’en génèrent plus que 20%.
En définitive, il est aujourd’hui quasiment impossible de rentabiliser un film. Un film nous coûte entre 80.000 et 100.000 euros, là où le prix moyen en France est misérablement de 3.500 euros. Nous produisons 24 films par an, 40 en comptant nos autres studios, plus une centaine d’émissions. La diversification de nos activités nous permet de vivre.
Vous recevez bien une aide de la part du cinéma français?
Le porno ne reçoit pas d’aides du CNC alors que nous payons 10% de taxe sur nos ventes à ce dernier, en plus de la TVA. Et les banques ne prêtent pas pour ce genre d’activité. La France est un pays très conservateur. La fermeture de trois-quarts des vidéoclubs, qui étaient les seuls canaux de distribution, a contribué à la chute de la consommation légale. Et comme ni la grande distribution ni les pureplayers culturels ne nous distribuent…
Le Salon de l’érotisme, c’est le moment idéal pour renouer avec votre public?
C’est un rendez-vous auquel nous ne participons pas car je pense que le sexe doit avoir un environnement haut de gamme et glamour. Cela n’existe pas en France mais je reconnais qu’il en faut pour tous les goûts. Marc Dorcel va justement à l’inverse du marché qui, lui, devient, sous la pression de groupe conservateur, de plus en plus ghettoïsé, économiquement diminué et donc un peu glauque.
Aujourd’hui, le profil du consommateur est connu. C’est un homme de 18 à 72 ans, sans variation de CSP ni de lieu d’habitation. Ce qu’il faut retenir, c’est que plus de 50% de la consommation de pornographie se fait en couple. C’est un divertissement qui pimente le couple. Et 20 à 25% des femmes seules majeures consomment des films X au moins occasionnellement.
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