Jean-François Kahn, écrivain, revient sur la situation chaotique qui règne en Lubie après la chute du régime de Kadhafi et sur le silence des médias.
Un chaos indescriptible, au point que les médias n’osent même plus le décrire.
Que se passe-t-il en Libye ? Absolument rien, si on se contente de regarder la télévision et d’écouter la radio.
Rien… Certes la Cyrénaïque, dont la capitale est Benghazi, a quasiment fait sécession ; de mini-guerres tribales, en particulier dans le Sud, ont fait plus de victimes encore que les affrontements entre milices rivales ; le pouvoir central est déliquescent ; les règlements de compte camouflés en répression de supposés kadhafistes se multiplient ; on ne torture pas moins aujourd’hui qu’hier ; les salafistes les plus enragés occupent le terrain que l’Etat leur abandonne… et tout se passe comme si on ne voulait surtout pas que les ex-dirigeants déchus – ou reconvertis – répondent de leurs crimes au risque de se laisser aller à certaines révélations.
Apparemment, cela n’intéresse plus personne. […]
Or, sur cet invraisemblable désastre, on préfère apparemment poser un voile pudique. Pourquoi ? Pour ne pas faire de la peine à BHL ? Parce que l’aventure libyenne, dont les Syriens payent aujourd’hui les conséquences, comme le paieront demain les Egyptiens, les Tunisiens et les Algériens, n’a pu se déployer qu’à l’abri d’un conformisme politico-médiatique justificateur ? Parce que le Qatar paye ?
Nos télévisions, elles, ont déjà tiré un trait : la Libye n’existe plus.