Harkis, départ des pieds-noirs, relations actuelles avec la France : Un apaisement sélectif
Trois questions de notre sondage permettent d’avoir l’opinion des Algériens sur des questions importantes de la guerre de libération ou des relations avec la France. La première est celle des harkis qui revient de manière récurrente sur le devant de la scène en France même, alors qu’en Algérie elle est peu abordée sinon pas du tout. La deuxième est celle du départ des pieds-noirs à l’indépendance.
Enfin, il y a la question des relations actuelles avec la France.
Le départ des pieds-noirs : la très grande majorité des algériens considère que c’est plutôt une bonne chose
A contrario de cette proportion, il y a le fait que plus de 30% ne considèrent pas que c’est une bonne chose.
En effet, 18% pensent que c’est plutôt une mauvaise chose, et 14% ne savent pas. Il faut, en effet, avoir à l’esprit le contexte colonial où, si le fait que la majorité des Européens étaient plutôt de condition modeste ou moyenne est souvent mis en exergue, n’empêchait pas cette frange de la population d’avoir un statut largement meilleur que celui de l’écrasante majorité des Algériens.
Le niveau d’instruction semble jouer de manière plutôt paradoxale.
En effet, plus il augmente et plus le départ des pieds-noirs est jugé comme «plutôt une bonne chose».
Les plus nombreux et de loin à le penser ont le niveau secondaire ou universitaire, avec respectivement 74% et 73% contre 60% le taux le plus bas.
Les harkis : la majorité des algériens ne veut pas pardonner
Sur l’ensemble des réponses, l’écrasante majorité des répondants, soit 84,5%, est contre le fait de pardonner aux harkis. Les harkis, de toute évidence, nourrissent plus de rancœur que les Européens. On note, toutefois, que 10% des Algériens sont pour le pardon, et 5,4% à ne pas être fixés sur la question.
Nous retrouvons quasiment le même taux de refus de pardonner chez les hommes que chez les femmes (85% et 84%). Nous constatons aussi les mêmes taux à travers les groupes d’âge. Enfin, le niveau d’instruction ne fait pas non plus apparaître de différence significative d’un niveau à l’autre.
Il semble donc que la question de refuser le pardon aux harkis fasse pratiquement l’unanimité dans la société algérienne. (…)
La possibilité pour l’Algérie d’avoir des relations normales, dépassionnées, apaisées avec la France : légèrement plus de la moitié des algériens pense que c’est possible.
C’est sur cette question que nous pouvons mesurer le mieux la prise de recul des Algériens par rapport à la question de la colonisation.
Si, en effet, l’Algérien ne peut pas encore pardonner aux harkis, ou trouver que le départ des pieds-noirs était une mauvaise chose, il accepte plus facilement un «âge de raison» dans les relations algéro-françaises.
Pour l’ensemble des réponses, on recueille un peu plus de la moitié (51%) d’opinions optimistes sur la possibilité d’asseoir des relations apaisées entre l’Algérie et la France.
Ceux qui pensent que non représentent 38% et les sans opinion 12%. Cette opinion est stable selon les sexes et selon les tranches d’âge, si on exclut les 55 et plus où les opinions favorables recueillent moins de suffrages (40% comparativement à une moyenne de 51%). (…)