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« Scenarii du chaos », titre à la « une » ce dimanche le journal « To Vima » (pro-gouvernemental). Il y a de l’inquiétude alors chez Venizélos (chef du PASOK), et de l’incertitude en Europe. Au-delà des « sondages » on sait que les ex grands partis peuvent s’effondrer aux prochaines législatives que tout le monde attend, mais qui ne sont pas encore proclamées.


Obsèques de Dimitri Christoulas à Athènes – (source : tsantiri.gr)

« Ne l’oublions pas derrière l’isoloir », peut-on lire dans un des messages laissés par les citoyens sur le cyprès de Dimitri Christoulas, pharmacien à la retraite jusqu’à lundi dernier. Le banquier Papadémos donnera des précisions prochainement sur les élections, selon la presse. Le pouvoir peut aussi avoir peur.

Fontaine de la place Syntagma « vengeance » – 5 avril 2012
Sur la place Syntagma  – 5 avril 2012
Sur la place Syntagma  – 5 avril 2012
L’uniforme du policier suspendu sur le cyprès – (source : tsantiri.gr)
En se suicidant, Dimitri Christoulas nous a laissé un testament politique. J’ai remarqué aussi jeudi matin ce nouveau slogan sur la fontaine au milieu de la place Syntagma « vengeance ». Ses obsèques ont eu lieu samedi, et ensuite, des personnes s’en sont prises à un policier sur cette même place. Il a été tabassé, déshabillé  alors qu’il quittait son service, la foule s’est emparée de son gilet pare-balles et de son talkie-walkie, pour brûler ensuite ce matériel. L’uniforme du policier a été suspendu sur le cyprès de Dimitri.
 
Ces derniers jours, notre police prétorienne a tout fait pour briser les rassemblements sur la place, des citoyens et des journalistes ont été violemment tabassés par certains agents, au point même, de provoquer l’indignation du principal syndicat des policiers (POESY). Trop tard ?

 

«Peuple en avant, ne baisse pas la tête, la seule réponse est la résistance et la lutte», fut le slogan unanime lors des obsèques. La fille du défunt a qualifié le suicide «d’acte profondément politique», lors de la cérémonie civile, car conformément aux voeux du défunt, engagé à gauche, la cérémonie a été civile, tandis que la dépouille devait ensuite être transférée en Bulgarie pour être incinéré. Notre Église orthodoxe, s’oppose encore (Troïka ou pas), à la création de crématoriums.

 

Jeudi encore, comme tous les autres jours depuis le suicide, les discussions sur la place Syntagma sont très animées. Journalistes, photographes, prises de notes et caméras de la colère, sous le regard des premiers touristes de la saison. Mais derrière le car du « Tour Official of Athens » se cache parfois celui des MAT (CRS), tandis qu’en même temps sur une banderole, on pouvait lire « Ce qui est important, ce n’est pas de perdre la vie, mais de perdre sa dignité humaine ».

 

Ainsi sans doute, le suicide de Dimitri a été suivi de deux autres suicides de retraités les jours suivants. À Kavala, au nord du pays, un instituteur à la retraite, âgé de 78 ans s’est suicidé vendredi en laissant ce message :

 

« Je ne supporte plus la perte de ma dignité, je ne supporte plus la crise, je demande pardon à mes enfants et à mes petits enfants » (source : enikos.gr). Samedi, un autre retraité âgé de 75 ans s’est suicidé par pendaison dans la région de Volos en Grèce centrale.
Derrière le car du « Tour Official of Athens » – Athènes 5 avril 2012
« Ne l’oublions pas derrière l’isoloir » – Athènes 5 avril 2012
“Ce qui est important, ce n’est pas de perdre la vie…” – (source : tsantiri.gr)
Nos cartographies du politique et des conduites sociales changent. Le grand historien Eric Hobsbawn aurait affirmé que les « vaincus des marchés », autrement-dit les couches moyennes déclassées peuvent se tourner vers des cartographies plus anciennes, « bien éprouvées » si l’on veut, à travers les syllogismes collectifs. Et de telles cartographies existent… à tous les étages. À part les représentations des familles philosophiques issues de la gauche, il y a aussi le fait religieux, l’armée, l’idée même de la nation.

 

Et en Grèce en ce moment ces syllogismes nous donnent parfois le tournis, car il semblerait que rien encore n’est décidé ni décisif, à part le Troïkanisme, maintenant nous le savons. C’est ainsi que les banquiers peuvent encore avoir un peu peur des élections et bien davantage peur des peuples.

 

« Nous ne pouvons pas rester sourds lorsque l’histoire frappe à notre porte », a déclaré Manolis Glezos (journal « Avgi » de ce dimanche). Pour ce grand résistant lors de la dernière occupation il s’agit déjà de la porte se situant à gauche de l’édifice politique.
“On veut la Révolution, pas les élections” – 5 avril 2012
Jeudi après-midi sur la place Syntagma j’ai été témoin de beaucoup de discussions animées à ce propos. Le front anti-mémorandum, est inscrit sur la carte des syllogismes du futur pour l’immense majorité des Grecs. Celui de la « vengeance » également, sauf que cette dernière à elle seule ne constitue pas une issue politique. C’est en ce moment précis que le suicide de Dimitri Christoulas devient un testament politique de fait.

 

Le policier blessé samedi sur la place de la Constitution, a été conduit à l’hôpital militaire d’Athènes. Pour ce qui est des circonstances exactes de cet événement, certains affirment que l’agent de police « aurait provoqué » les manifestants. À l’heure actuelle rien n’est certain à ce propos, à part le vrai contexte dans les représentations collectives, « vengeance ».

 

Marios Lolos, reporteur et photographe vient d’être opéré dans un autre hôpital. Son état est jugé critique, après une hémorragie interne cérébrale. Il a été frappé par un policier appartenant aux unités des MAT et utilisant sa matraque, peu avant 9h du soir près de la place Syntagma. Il paraît que la police reçoit des ordres allant dans ce sens : « interdire » aussi toute prise d’images. Vision embrouillée du monde. Soleil couchant sur Athènes.
Athènes, 5 avril 2012

Greek Crisis Now

(Merci à Three Piglets)

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