Directeur de recherches au CNRS, l’historien Stéphane Courtois est un spécialiste du communisme. Elève d’Annie Kriegel, il a été le maitre d’oeuvre du Livre noir du communisme. Son dernier livre, “le Bolchevisme à la française” (Fayard) est paru en 2010. Historien engagé, mais grand connaisseurs des archives, il nous décrit la face caché d’un personnage aujourd’hui encensé.
Qui était vraiment Raymond Aubrac ?
Un agent soviétique, mais pas au sens où il aurait travaillé pour le services d’espionnage de l’Union soviétique. Il était plutôt un membre important du réseau communiste international, un sous-marin communiste, en tout cas, beaucoup plus qu’un agent d’influence. Un homme comme lui avait évidemment un agent traitant à Moscou.
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Son rôle durant la Résistance a fait l’objet de polémiques. On se souvient d’un procès contre l’historien Gérard Chauvy et d’une table ronde organisée en 1997 par Libération. Qu’en pensez-vous ?
Pendant longtemps, Aubrac et son épouse Lucie ont raconté qu’il s’était pu s’évader à la suite d’une opération de la Résistance. Or, Arthur Kriegel – qui a participé à cette action commando – assurait qu’Aubrac n’était pas là.
Puis Aubrac a reconnu dans la biographie “autorisée” que Pascal Convert lui a récemment consacrée qu’il ne s’était pas évadé, mais qu’il avait été libéré. Il coopérait alors avec l’ORA, l’organisation de résistance de l’armée.
Un autre épisode pose problème. A la Libération, il est commissaire régional de la République à Marseille. Or De Gaulle va le virer sans ménagement et sans explications.
On sait aujourd’hui pourquoi : il avait couvert des lynchages dans des prisons, notamment en Avignon ainsi que l’assasinat de militants trotskystes indochinois. Et à Marseille, il créa des CRS (Compagnies républicaines de sécurité) dont on découvrit qu’elles étaient entièrement infiltrées par le PC.
Quant à la table ronde de Libération, une anecdote est significative : Aubrac s’est mis en colère lorsque Daniel Cordier lui a demandé d’avouer enfin qu’il était communiste. Jusqu’au bout, il l’aura nié. C’était un gros poisson de l’appareil, très bien camouflé, en partiuclier derrière l’image de sa femme.
Secret défense