Loin des cités et des quartiers sensibles, c’est dans les campagnes que Marine Le Pen a recueilli dimanche ses succès les plus inattendus. Libération est allé dans deux départements ruraux à la rencontre de ces nouveaux électeurs frontistes.
Nous, on trime, et dans les cités vous voyez des gens qui vivent avec des allocations. C’est nous qui payons ça.
Le cadre est champêtre: des prairies, du blé en herbe, des bouquets d’arbres et des villages de 300 à 1 500 habitants. On est à 30-40 kilomètres de Rennes : pas de cités, pas de zones sensibles, pas d’insécurité, pas d’immigration, le fonds de commerce traditionnel du FN. Pourtant, dans ces communes rurales d’Ille-et-Vilaine, Marine Le Pen réalise des résultats proches ou supérieurs à ses 17,9% recueillis au premier tour de la présidentielle. […]
Ce qui fait beaucoup sur ces terres centristes où le FN n’avait jamais véritablement percé. Mais, dans ces villages, le vote frontiste n’est pas encore assumé. Seuls des militants encartés s’expriment en déclinant leur identité. Les autres mentionnent juste leur prénom. […]
«Nous l’avions vu venir, fanfaronne Vincent Gérard, représentant départemental du FN. Sur les marchés, les gens ne nous faisaient plus des clins d’œil discrets, ils venaient nous parler. Le nombre de nos adhérents a explosé. Surtout les jeunes.» D’après lui, les arguments économiques ont primé. […]
Quelques kilomètres plus loin, dans la commune de Saint-Martin-le-Mault, le FN caracole à 30,38% des voix, contre 17,65 % il y a cinq ans. «C’est la première fois que je vote FN», assume Sandrine, 38 ans, à l’entrée de sa petite maison cimentée. Cette commerçante, qui parcourt foires et marchés de la région avec son stand de prêt-à-porter, en a eu «ras le bol que les étrangers soient mieux traités» : «J’ai trois enfants, je suis seule, avec la crise je ne gagne quasiment plus rien. Si je m’appelais Bamboula, j’aurais plus de droit.» […]
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