Pour faire le ménage à la fac de Lorraine, il y a de plus en plus d’employés du privé aux horaires et conditions de travail déments, qui triment dans l’indifférence. (…)
En apparence, les deux équipes font le même métier. Balai, seau, serpillière, elles manient les mêmes outils. Mais derrière cette façade, tout change : le salaire, les horaires, le statut. Les conditions de travail ne se sont pas doucement « dégradées » : brutalement effondrées. Et tout ça, sans une bataille, sans un conflit avec la direction, sans une lutte par médias interposés, sans un syndicat qui y met son nez, sans un tract distribué, sans un meeting organisé, sans une délégation reçue, sans le bureau d’un décideur occupé.
Au milieu d’elles, vraiment à leurs côtés, déambulent les étudiants, les enseignants, plutôt marqués à gauche ici, qui manifestent à l’occasion – contre la réforme des retraites, contre la loi LRU, contre le CPE auparavant – mais qui n’ont, en l’occurrence, pas fait signer la moindre pétition, pas marqué la moindre solidarité. (…)
« Vous le connaissez, lui ? » je demande à Cathy. Mon doigt pointe une affiche, annonçant la venue de Mélenchon à Nancy. A Sciences-Po, pas ici. « C’est qui ? » me répond-elle.
« De toute façon, la politique j’ai pas le temps pour. Les politiques, ils promettent mais font jamais rien. Les ouvriers, les gens comme nous, ils s’en moquent bien. »
Avant d’énoncer que, quand même :
« On parle toujours de gauche, de droite, mais jamais du Front national. Jamais on a été gouverné par eux. Peut-être qu’y aurait du changement. En bien. Peut-être qu’ils feraient pour l’ouvrier, pour la France.
– Vous aviez voté pour Le Pen en 2002 ?
– J’avais eu l’espoir, oui, mais je vote jamais. Un jour peut-être, quand je serai vraiment à bout, j’irai voter. »