Mercredi, Manuel Valls a affiché sa volonté de fermeté sur le dossier de l’immigration. S’il voit des «avancées par rapport au précédent gouvernement», David Rohi, responsable de la commission éloignement de la Cimade, estime que le ministre de l’Intérieur n’est pas «dans une véritable rupture».
En liant les régularisations et la période de crise, Manuel Valls reste fondamentalement dans le paradigme qui est de dire que l’immigration est une charge, un poids et coûte à la Nation.
Quelle est votre réaction suite aux propos tenus par Manuel Valls sur l’immigration ?
Il y a des avancées par rapport au précédent gouvernement. On ne peut pas le nier. Par contre, nous sommes beaucoup plus réservés sur le fait que le ministre annonce d’une part une rupture avec la politique du chiffre, mais annonce de l’autre 30.000 régularisations (par an, soit le même nombre que sous le gouvernement Fillon, Ndlr). Cela nous paraît être une très mauvaise chose. Il n’est donc pas dans une véritable rupture. […]
Des dizaines de milliers de clandestins vivent dans la précarité aujourd’hui. Si on les régularise, nous aurons beaucoup moins de soucis pour les prendre en charge. Les régulariser, ce n’est pas une charge supplémentaire, mais leur donner les moyens de leur autonomie. Pareil sur le plan de l’emploi. Quand des migrants entrent sur le territoire, cela n’entraîne pas mécaniquement une augmentation du nombre de chômeurs. Nous savons très bien que l’immigration a un coût, mais qu’elle est aussi une ressource. […]
Jean-Luc Mélenchon estime que Manuel Valls «valide une thèse absurde, anti économique, ridicule du Front National (…) sur le sujet d’après lequel il y aurait un rapport entre l’immigration et les difficultés sociales». Qu’en pensez-vous?
Je pense que le gouvernement doit être courageux. Effectivement, cela ne va pas être facile après dix ans de matraquage où on a répété qu’il fallait expulser, que l’immigration n’était qu’un problème… Surtout qu’il y a une sensibilité de l’opinion publique sur ces sujets. Mais le gouvernement va devoir faire de la pédagogie et expliquer que, pendant des années, on a raconté n’importe quoi. Il ne pourra pas s’en sortir autrement qu’en expliquant que jusqu’à présent, on a marché sur la tête. Il faut rétablir la vérité sur ce qu’il s’est passé et se poser la question d’une position dépassionnée, ambitieuse.
Le JDD