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Alors que se poursuit actuellement le procès en appel de Jérôme Kerviel, la journaliste Olivia Dufour, auteur de Kerviel : enquête sur un séisme financier (Eyrolles), a livré son point de vue sur les causes de l’affaire sur France Info ce 27 juin au matin.

Après s’être défendu dans un premier temps en arguant que la banque ne pouvait pas ne pas savoir ce qu’il faisait, il charge désormais la barque en estimant même qu’une cellule grise surveillant ses actes avait besoin qu’il fasse des pertes pour compenser la perte sur les subprimes. “Une fraude pour distraire les esprits”, en somme… C’est en tout cas ce qu’a expliqué Olivia Dufour. Quelle est donc réellement la part de responsabilité de l’ex-trader dans l’affaire ? Et celle de la Société Générale ?

Cinq ans de prison ferme et 4,9 milliards d’euros de dommages et intérêts à verser à la Société Générale, c’est la peine incommensurable qui menace l’ex-trader.

“Si la Société Générale n’a rien vu, c’est que cela peut se reproduire n’importe où et n’importe quand”

Olivia Dufour a notamment expliqué en des termes très pédagogiques comment une telle erreur avait été possible : “Ce qu’on n’a peut-être pas assez compris dans cette affaire, c’est ce que vos auditeurs comprendront tout de suite s’ils ont déjà eu affaire au service client d’une entreprise dès qu’on a un petit problème transversal, le truc vole en éclats et on peut avoir, deux, trois, six mois d’ennui sur un problème simplissime. L’affaire Kerviel c’est ça : ce sont des tâches fractionnées avec des gens qui ne voient pas plus loin que la petite mission qu’on leur a donné à faire de sorte que s’il y a un problème transversal le système devient fou”.

“Il faut remettre de l’intelligence humaine dans le management des entreprises”

Une simple épingle dans l’engrenage… L’idée fait froid dans le dos quand on sait que le phénomène se généralise et se banalise de plus en plus : “Et c’est ce qu’on trouve dans toutes les grandes entreprises : les banques, le nucléaire… Tous ces groupes qui emploient 100 000, 200 000 personnes salariées, pour les manager il faut mettre en place ce type de système, mais on est en train de découvrir, et c’est ça la leçon de l’affaire Kerviel que ces systèmes peuvent devenir complètement absurdes et complètement aveugles”, a précisé la journaliste selon qui le problème n’est pas assez connu.

“Dans des colloques extrêmement scientifiques, extrêmement confidentiels, il y a des gens qui sont au courant de cela et qui lancent une vraie alerte en disant qu’il faut remettre de l’intelligence humaine dans le management des entreprises. La solution elle est là”, estime-t-elle.

Éteindre des feux sans en trouver le foyer

Olivia Dufour n’hésite donc pas à mettre en cause les rouages défaillant de tout un système qui a pourtant l’air bien rôdé : “On continue à vivre sur l’idée que la procédure très administrative décrite au millimètre c’est ça la sécurité. Or, quand on a interrogé les contrôleurs de la Société générale – parce qu’il a déclenché 74 alertes en un an, Jérôme Kerviel – les contrôleurs ont dit  ‘mon métier consiste à éteindre l’alerte pas à comprendre le problème. (…) Ça n’est pas mon métier de comprendre (…) Si on essaye de comprendre, on grippe le système’. C’est donc ça qu’il faut d’urgence repenser”.

My Boox
(Merci à Cécilia)

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