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Chaque crachat reçu sur la visière du casque, chaque projectile amorti par la coque du plastron, chaque insulte absorbée par le cerveau sans altérer l’impassibilité du visage tend, cran après cran, chaque muscle, chaque neurone du CRS comme une corde de boyau prise à même ses tripes.
L’ordre de charger est une délivrance pour ces policiers à la matraque levée comme un étendard. Parmi eux se trouvent Cobra (Pierfrancesco Favino), Negro (Filippo Nigro) et Mazinga (Marco Giallini). Un groupe soudé bientôt rejoint par Adriano (Domenico Diele), une nouvelle recrue.

Pourquoi sont-ils devenus gardiens de l’ordre, ceux que les skinheads surnomment Acab (All Cops Are Bastards) ?

Par vocation de servir la loi ? Par soif d’action et de baston ? Sans doute pour tout cela et pour d’autres raisons encore, plus obscures.
En tout cas, ce n’est pas pour l’argent. Smicards en uniforme, ils ne sont guère mieux lotis que les ­ouvriers qu’ils tabassent, que les ­expulsés qu’ils délogent ou que les ­hooligans qui les narguent à la sortie des stades. Ces « bâtards » de flics sont les miroirs déformés par la haine de l’Italie contemporaine.

Méprisés par leurs concitoyens, traités comme des chiens (de garde) par le pouvoir, rongés par des problèmes personnels, ces pitbulls de la démocratie n’ont plus qu’une seule famille, leurs frères d’armes…

Pour son premier long-métrage, le fils du réalisateur Sergio Sollima (« La cité de la violence », avec Charles Bronson) frappe très fort avec ce film-matraque, un des rares, et peut-être même le seul, à prendre pour héros des CRS (du moins leurs équivalents transalpins). A travers les portraits torturés de ces flics de « seconde zone » mais de première ligne, Stefano Sollima passe l’Italie au scanner du ras-le-bol social pour nous montrer ses démons.

Le fascisme renaissant et le racisme ordinaire apparaissent, véritables tumeurs malignes, dont quelques métastases sont déjà visibles en France et ailleurs.

Filmée avec une virtuosité époustouflante, la hargne populiste est ici un personnage à part entière.
Paris Match

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