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Il ne saurait y avoir plus mauvais présage. Il y a tout juste un an, la crise de l’euro frappait durement. Elle aura duré plus de six mois pleins pendant lesquels les marchés ont été meurtriers, exigeant des dirigeants européens un compromis, un de plus, accouché au forceps, l’épée dans les reins. Le pacte budgétaire de fin juin a sonné comme une délivrance. Hélas, très vite métamorphosée en déception. Au début de l’été, la hantise d’une récidive semblait écartée par les gouvernants et marchés. Quelques semaines plus tard, l’incendie fait rage. Le foyer d’Espagne surtout, où les taux d’intérêt dépassent allègrement les 7 % et qui place toute l’Europe du Sud en état d’incandescence.

(…) A quoi peut bien servir le filet de protection négocié à Bruxelles pour l’Espagne et l’Italie ?

L’acte 3 de la dramatique a débuté

L’enlisement ibérique tient lieu de réponse. L’affolement gagne. L’Europe partage la même monnaie mais l’Europe de la dette est scindée en deux par des marchés qui n’hésitent plus à étrangler le Sud, avec toutes les conséquences que cela suppose. L’acte 3 de la dramatique a débuté. La chute de la monnaie unique en est le symptôme le plus inquiétant : les marchés vendent l’euro, ce qu’ils avaient jusqu’ici répugné à faire. Ils cherchent refuge dans des titres d’Etat hors zone euro, ce qui veut tout dire. Les difficultés financières des régions de Valence, Murcie, Catalogne, ont tout précipité. En début de semaine, le gouvernement central s’obstinait à refuser un sauvetage global, comptant sur le secours d’une BCE qui faisait mine de ne pas entendre. Des taux de 7,5 % à 10 ans sont évidemment insupportables pour un Etat qui, pour sa part, estime avoir pris toutes les mesures d’austérité budgétaire possibles mais qui se trouve pris au piège d’une récession durable.

Le gouvernement Rajoy a-t-il trop longtemps louvoyé ? A-t-il véritablement d’autre hypothèse que d’en appeler à l’aide extérieure ? Les marchés sont sûrs que non. Le sauvetage de Bankia a été “mené en dépit du bon sens. L’exécutif madrilène a eu son chèque mais y a perdu beaucoup de son crédit”, juge un banquier parisien. Depuis lors, le climat ne cesse de se détériorer. “Courage, l’Espagne n’est pas l’Ouganda…” Certes, mais la colère monte. Le risque de propagation tourmente acteurs et observateurs. Et les marchés, fidèles à eux-mêmes, s’alarment d’une dette extérieure à plus de 1 000 milliards et de l’état du système bancaire vérolé par l’immobilier. C’est clair, la dette publique est sur une trajectoire mortifère. Les dégradations des notes de l’Espagne éloignent un peu plus les investisseurs. Les conditions d’accès à l’emprunt des entreprises sont de plus en plus difficiles. La totale.

La position inconfortable de la BCE

Certains se rassurent en se convainquant que le salut finira quand même par venir de la Banque centrale à Francfort à qui les dirigeants espagnols adressent des appels du pied pathétiques. Pourquoi la BCE ? Parce qu’elle est aujourd’hui la seule voie de recours. Parce que son président a beau dire que l’euro n’est pas en danger et qu’il est même “irréversible”, cette assertion à la une du Monde suffit à confirmer qu’il y a le feu dans la maison. Draghi l’Italien est en position inconfortable : les misères de son propre pays sont du même ordre. Le mandat de l’Institution de Francfort, dit-il, est de maintenir la stabilité des prix mais elle n’a pas de “tabous” et reste très “ouverte”.

Et d’ajouter que l’idée d’un “marchandage entre les Etats et la BCE est un quiproquo”. Marchandage, il ne saurait y avoir, en effet, les statuts de la BCE sont formels là-dessus. Mais comme les marchés n’achètent pas le plan européen aux banques espagnoles, la question n’est pas de savoir si “la banque centrale va acheter des obligations d’Etat espagnoles, mais quand”, spéculait mardi soir un opérateur français.

La banque a cessé de racheter des titres d’Etat depuis mars de cette année. Son encours de dettes souveraines reste à 211 milliards. Dans son cadre d’intervention, un troisième LTRO (Long Term Refinancing Operations) de 400 milliards ou plus permettrait de soulager en Espagne et en Italie, sachant que le sort de la Grèce, lui, apparaît scellé sur les marchés : c’est par ici la sortie !

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