Pour Atmane Aggoun, sociologue, les émeutes dans les banlieues constituent une des étapes devant parvenir à la «reconnaissance» des populations qui y vivent par la société d’accueil.
Le sujet jouissant de reconnaissance est celui qui, en faisant partie d’un corps social, bénéfice de tous les droits qui lui donnent accès à pleine citoyenneté dans une société ouverte et caractérisée par le respect de différences.
Il faut s’attendre à une réaction de la part des groupes lorsqu’ils subissent un manque évident de visibilité, lorsqu’ils ne se sentent pas insérés dans l’ensemble des relations et des interactions qui caractérisent toute société, ou, tout simplement, lorsqu’ils sont dans l’attente d’une visibilité sociale qui n’arrive pas à s’accomplir. Les attentes frustrées d’une visibilité sociale provoquent des réactions différentes.
Les individus ou les groupes réagissent au manque de visibilité de deux manières distinctes. D’une part, l’individu peut changer la perception qu’il a de lui-même, de son collectif et de sa place dans la société. Ce changement peut l’amener vers une situation de repli sur soi lorsque l’individu n’est pas capable de réagir face au discours dominant qui le transforme en déviant. D’autre part, le manque de visibilité sociale peut conduire à la transformation d’un sentiment de révolte, de prise de conscience de soi-même ou de son collectif comme victime d’une situation qui est considérée injuste, provoquant un mouvement d’action collectif ou de résistance, considérés par ces individus comme le dernier recours dans leur lutte pour devenir visibles. […]
Le Monde