On a déjà évoqué sur ce blog la “Nationalité” d’une société industrielle dont les français pensent qu’elle est “automatique” ou “historique” en quelque sorte alors qu’elle peut être reliée à différent facteurs comme la nationalité de ses propriétaires, c’est à dire les actionnaires, ou à la localisation de son siège social, ou de ses principaux actifs, ou encore à la localisation de la bourse sur laquelle ses actions sont cotées.
Ci-dessus un graphique de la nationalité des fonds investis sur les actions du CAC 40 en juin 2011 et en Juin 2012. On constate que cette nationalité est à peu près partagée entre un tiers de fonds français , un tiers de fond américains et un autre gros tiers de fonds autres dont une partie importante est constituée de fonds britannique.
Il y a donc une “nationalité ressentie” et une “nationalité effective” qui est celle des propriétaires des actions. Cette dernière elle même n’étant pas particulièrement facile à identifier car avec la floraison de fonds de placement, Sicav et fonds d’investissements divers , il n’est désormais plus possible d’accéder au propriétaire individuel de telle ou telle action et donc de connaitre la “vraie” nationalité de ses propriétaires.
Autre élément perturbateur cette propriété individuelle évolue tous les jours et la nationalité dominante du jour des propriétaires des actions n’est pas nécessairement la même que celle du lendemain!
Prenons quelques exemples. Pour le ressenti de tous les français, Total, Alcatel ou l’Occitane sont des sociétés françaises parce que historiquement elles ont été créées en France et sont cotées sur la bourse de Paris.C’est vraisemblable pour Total sauf qu’il n’y a pas de suivi de la nationalité des propriétaires des actions au jour le jour non plus que de celle des fonds d’investissements qui en possède des actions, que les actifs de Total sont largement situés en dehors de la France et qu’il n’est même pas sur que la nationalité dominante de ses employés soit française!
Pour Alcatel,c’est la holding de tête c’est à dire la structure la plus élevée dans l’organisation de la société qui est cotée aux Pays Bas. Quant à la nationalité de ses employés, depuis l’acquisition de Lucent, il n’est même pas quelle soit française de manière prédominante. Quant à l’Occitane dont le nom la rattache indubitablement à des origines françaises et provençale même, elle a été introduite par son dirigeant actuel et actionnaire le plus important, de mémoire de nationalité autrichienne, à la bourse de Hong Kong!
Il n’est donc possible que d’avoir des informations statistiques sur la nationalité des fonds investis sur les actions des sociétés cotées sur la Bourse de Paris et encore que sur les plus importantes, par exemple celles des sociétés du CAC 40.
Les français n’ont donc pas la majorité de la propriété de leurs propres entreprises! A titre de comparaison, les fonds américains possèdent 83 % des actions du Dow Jones, les anglais 43 % des actions de l’index Footsie et anglais plus américains en possèdent 73 %. Il y a des raisons structurelles à une telle différence, en particulier le fait que nos systèmes de retraite sont basés sur la répartition alors que les systèmes anglo-saxons sont basés sur la capitalisation et donc orientés vers les placements actions.
Cela traduit aussi une posture culturelle profonde qui est le désamour des français pour leur industrie et leur peu d’appétence pour les placements jugés risqués que la crise financière actuelle ne peut qu’aggraver. C’est d’ailleurs vraisemblablement ce que signifie le fait qu’entre juin 2011 et 2012 la part de fonds français ait baissée de 34 à 28 % alors que celles des fonds américains et des autres fonds a monté en compensation.
Tout ceci signifie néanmoins que nos grandes sociétés sont forcément en proportion plus à l’écoute de leurs actionnaires étrangers et américains que de leurs actionnaires français et plus dépendants des actionnaires américains que leurs collègues dirigeants des sociétés allemandes ou américaines. Ils seront donc par force plus mondialisateurs/globalisateurs que ces derniers. […]