La 50e proposition de François Hollande pour l’élection présidentielle est courageuse et reflète une évolution nécessaire du code électoral français : “J’accorderai le droit de vote aux élections locales aux étrangers résidant légalement en France depuis cinq ans.” Il reprend ainsi une proposition qu’avait déjà émise, sans pouvoir la réaliser, François Mitterrand en 1981, reconnaissant ainsi la contribution des étrangers à toutes les facettes de la vie de notre pays, qu’il s’agisse de vie économique, associative, culturelle, artistique, etc. Et c’est sans compter leur participation égale à l’impôt, qui reflète plus que tout leur appartenance à la République.
François Hollande a mis en avant, tout au long de sa campagne, une conception de la citoyenneté ouverte, digne héritière de la Révolution française et de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, sans qu’un lien entre citoyenneté et nationalité soit indispensable. Les sirènes de l’UMP et du Front national ne le firent pas reculer lors de la campagne, au contraire : ce sujet tranche net la séparation entre la gauche et la droite.
L’obstacle des mœurs invoqué par François Mitterrand en 1988 n’en est plus un : en novembre 2011, 61 % des Français y étaient favorables. Après de nombreuses tentatives de la part des parlementaires de gauche pour proposer le droit de vote des étrangers, à l’Assemblée et au Sénat sous des gouvernements de droite, une loi constitutionnelle a été adoptée au Sénat le 8 décembre 2011.
A la veille de la reprise des travaux parlementaires, le temps presse. En effet, mettre en place le droit de vote et d’éligibilité des étrangers aux élections municipales ne se fera pas en un jour. D’abord parce que l’adoption de la loi constitutionnelle à l’Assemblée nationale, la réforme de la Constitution par le Parlement, la loi organique et sa mise en application requièrent un temps incompressible. Par ailleurs, cette mesure changera la nature du corps électoral en France : loin d’être votée à la va-vite, elle doit au contraire être discutée publiquement pour en expliquer la portée et sa contribution à une République réconciliée avec ses citoyens.
A celles et ceux qui nous disent que nous voulons favoriser le communautarisme par cette mesure, nous répondons que c’est au contraire l’inégalité de traitement entre l’élu et ses administrés qui favorise une organisation communautarisée de la société. Aujourd’hui, les étrangers, qui contribuent à la vie locale notamment par l’impôt, sont placés en situation d’invisibilité politique.
Pour rappel et afin de calmer les ardeurs nationalistes de la droite, en comptant les ressortissants de l’Union européenne, les étrangers participant aux scrutins municipaux représenteraient seulement 6 % du corps électoral.
A celles et ceux qui nous disent que le droit de vote et la nationalité sont liés, et qu’une telle mesure nuirait à la souveraineté nationale, nous répondons que toute modification de la Constitution est l’expression elle-même de la souveraineté du peuple. Lui seul peut décider, comme il l’avait déjà fait en 1793, d’ouvrir le droit de vote aux étrangers résidant en France pour les élections municipales. C’est donc au peuple souverain de décider de cette ouverture du vote, et les parlementaires que nous sommes ne laisseront pas les forces conservatrices et de l’extrême droite confisquer ce droit aux citoyens.
A celles et ceux qui nous disent que cette mesure est dérisoire, nous répondons qu’elle est essentielle. D’abord pour redonner du sens à un rituel civique appauvri, notamment dans les quartiers populaires. (…)
Suite sur le site du Monde
Les 75 députés signataires : Pouria Amirshahi (Français établis hors de France), Nathalie Appéré (Ille-et-Vilaine), Alexis Bachelay (Hauts-de-Seine), Serge Bardy (Maine-et-Loire), Philippe Baumel (Saône-et-Loire), Nicolas Bays (Pas-de-Calais), Karine Berger (Hautes-Alpes), Philippe Bies (Bas-Rhin), Gisèle Biémouret (Gers), Jean-Pierre Blazy (Val-d’Oise), Yves Blein (Rhône), Patrick Bloche (Paris), Isabelle Bruneau (Indre). Gwenegan Bui (Finistère), Jean-Claude Buisine (Somme), Colette Capdevielle (Pyrénées-Atlantique), Alain Calmette (Cantal), Christophe Caresche (Finistère), Nathalie Chabanne (Pyrénées-Atlantique), Marie Anne Chapdelaine (Ille-et-Villaine), Valérie Corre (Loiret), Pascal Deguilhem (Dordogne), Sébastien Denaja (Hérault), Fanny Dombre-Coste (Hérault), Sandrine Doucet (Gironde), Jean-Pierre Dufau (Landes), Laurence Dumont (Calvados), Martine Faure (Gironde), Alain Fauré (Ariège), Mathias Fekl (Lot-et-Garonne), Richard Ferrand (Finistère), Geneviève Gaillard (Deux-Sèvres), Laurent Grandguillaume (Côte-d’Or), Estelle Grelier (Seine-Maritime), Edith Gueugneau (Saône-et-Loire), Jérôme Guedj (Essonne), Elisabeth Guigou (Seine-Saint-Denis), Razzy Hammadi (Seine-Saint-Denis), Mathieu Hanotin (Seine-Saint-Denis), Régis Juanico (Loire), Pierre-Yves Le Borgn’ (Français établis hors de France), Dominique Lefebvre (Val-d’Oise), Axelle Lemaire (Français établis hors de France), Annick Lepetit (Paris), Jean-Pierre Le Roch (Morbihan), Arnaud Leroy, (Français établis hors de France), Audrey Linkenheld (Nord), Lucette Lousteau (Lot-et-Garonne), Marie-Lou Marcel (Aveyron), Jean-René Marsac (Ille-et-Vilaine), Martine Martinel (Haute-Garonne), Sandrine Mazetier (Paris), Patrick Menucci (Bouches-du-Rhône), Corinne Narassiguin, (Français établis hors de France), Philippe Noguès (Morbihan), Maud Olivier (Essonne), Christian Paul (Nièvre), Hervé Pellois (Morbihan), Elisabeth Pochon(Seine-Saint-Denis).