Les cours du blé, du maïs et du soja ont atteint des niveaux record cet été. Entre mi-juin 2012 et fin juillet, le prix du blé a bondi de 50 %, celui du maïs de 45 %. Quant au soja, il a grimpé de 30 %. La sécheresse n’est pas seule en cause. « Les politiques européennes de soutien aux agrocarburants jouent un rôle central dans la hausse des prix alimentaires », assure Oxfam.
L’ONG révèle dans un nouveau rapport [1] que la surface agricole nécessaire pour alimenter les voitures européennes en agrocarburants en 2008 aurait pu permettre de produire assez de blé et de maïs pour nourrir… 127 millions de personnes pendant un an ! « C’est simple : si les gouvernements européens ne renoncent pas à leurs politiques de soutien aux agrocarburants, ils mettent en péril le droit à l’alimentation de millions de personnes », poursuit Oxfam.
Au niveau européen, la Directive énergies renouvelables impose que 10 % de l’énergie utilisée dans les transports soit produite à partir de sources renouvelables d’ici à 2020. Ces énergies renouvelables sont quasi-exclusivement (à 90%) des agrocarburants de première génération, c’est-à-dire produits à partir de matières premières agricoles (soja, colza, tournesol, huile de palme, maïs, blé…), ajoutés aux carburants traditionnels.
L’appétit croissant de l’Europe pour les agrocarburants pourrait continuer de faire grimper les prix de certaines denrées alimentaires de 36 % supplémentaires d’ici à 2020, souligne Oxfam. Une inquiétude que partage plusieurs agences des Nations Unies [2], qui ont lancé le 4 septembre un appel conjoint intitulé : « Affronter les causes profondes de la hausse des prix alimentaires et de la faim dans le monde ».
Vers la fin des agrocarburants ?
Face à ces dramatiques effets pervers, la Commission européenne envisagerait de réviser ses objectifs d’incorporation d’agrocarburants à la baisse, en baissant le seuil de 10 à 5 % d’ici 2020. Le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a également déclaré vouloir marquer une pause dans le développement des agrocarburants entrant en concurrence avec les cultures à vocation alimentaire. Selon le plan d’action pour l’agriculture présenté le 12 septembre, le taux d’incorporation d’agrocarburants serait limité à 7 %. Rappelons qu’en France, les subventions aux agrocarburants, via des incitations fiscales, se sont élevés, entre 2005 et 2010, à 3 milliards d’euros.
Cette pause dans le soutien aux agrocarburants est une bonne nouvelle a priori. Sauf que dans le cas de la France comme de l’Union européenne, ces limitations ne concernent que les agrocarburants de première génération. L’un comme l’autre désirent encourager les agrocarburants de deuxième génération. Ceux-ci proviennent de matière organique n’entrant pas en apparence en conflit avec l’alimentation : l’éthanol est par exemple produit à partir de lignine et de cellulose, et l’agrodiesel à partir d’algues. Mais le risque demeure d’une concurrence avec la production vivrière pour l’accès aux terres ou à l’eau, déplorent plusieurs organisations environnementales.
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Notes
[1] Télécharger le rapport « Les semences de la faim »
[2] L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le Fonds international pour le développement agricole (FIDA) et le Programme alimentaire mondial (PAM)
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