Chronique de Franz-Olivier Giesbert dans Le Point.
Les perroquets de la bien-pensance ne nous autorisent qu’à rappeler à l’ordre l’Église catholique, à qui, pourtant, la société semble échapper peu à peu. Ils nous interdisent, en revanche, d’interpeller l’islam, corseté dans une posture victimaire, sous prétexte qu’il ne faudrait pas le froisser. C’est tout ce qui leur reste du christianisme, cette stratégie de l’apaisement. Au premier soufflet, ils tendent toujours l’autre joue.
Quand on referme le dernier livre de Nicolas Baverez, Réveillez-vous ! c’est un sentiment d’accablement qui vous envahit, et pour longtemps. Notre ami sera sans doute traité de mauvais coucheur ou de prophète de malheur et pourtant ce qu’il nous annonce depuis des années est en train de se produire sous nos yeux. L’effondrement économique. La faillite des élites. Les conséquences du stupide déni français.
[…] le climat délétère des dernières semaines rappelle, à bien des égards, celui que Marc Bloch décrivait dans L’étrange défaite, écrit en 1940 et publié en 1946, où l’historien recherchait les causes de notre fiasco militaire, sur fond d’aveuglement, de fatigue morale et de ligne Maginot. […]
Toutes les générations ont le sentiment que l’Histoire a commencé le jour de leur naissance et celles qui sont aujourd’hui au pouvoir partout en Occident ont perdu le sens du tragique. N’ayant connu que des guéguerres, elles ont oublié qu’elles déambulent au-dessus des charniers enfouis des conflits d’hier qui peuvent recommencer demain.
Il y a tant d’électricité dans l’air, en Europe, à cause de la crise, et plus encore au Proche-Orient, saisi par ses démangeaisons religieuses, que l’une et l’autre semblent à la merci de la moindre étincelle. Comme si l’avenir nous préparait, ici ou là, d’autres étranges défaites […]
Par bonheur, nous ne sommes plus au temps où, devant les polémiques, les intellectuels musulmans modérés prenaient leur courage à deux pieds et fuyaient le débat. La bonne nouvelle des dernières années est qu’un certain islam de France n’hésite plus à défendre les valeurs de la République. Merci à lui. Merci à Malek Chebel, à Dalil Boubakeur et à l’imam de Drancy. […]
Le Point