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Ancien patron de la lutte antiterroriste, le juge Jean-Louis Bruguière réagit au coup de filet antiterroriste lancé en France ce week-end.

L’ex-juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière décrypte une nouvelle tendance d’action.
LE FIGARO. – Que vous inspire l’affaire Louis-Sidney?
Jean-Louis BRUGUIÈRE.- On est dans le droit-fil de ce qui émergeait dans les années 1990. Le plus important est le phénomène des conversions. Souvent, les convertis à l’islam sont les plus dangereux. Il y a eu le gang de Roubaix, dans les années Pasqua, et, plus tard, en 2003, nombre de jeunes convertis français impliqués dans les filières djihadistes en partance pour l’Irak. Aujourd’hui, c’est Jérémy Louis-Sidney, mais je me souviens de Willy Brigitte, lui aussi antillais converti à l’islam, arrêté en 2003, puis jugé et condamné. Il œuvrait dans le réseau de la rue Myrah, à Paris. Durant sa formation au combat au Yémen, il était tellement excité que les autorités locales ont préféré l’expulser.
Mais d’où vient ce mélange des ­genres avec le banditisme?
L’enquête nous dira si cette cellule cannoise avait un lien avec le Takfir, cette sorte de secte qui légitime la violence de droit commun. Toujours est-il que cette double casquette de voyou et de terroriste est un profil de plus en plus répandu dans les dossiers instruits par les juges spécialisés à Paris. Elle permet la dissimulation pour les membres de ces réseaux, qui sont même autorisés à manger du porc et à boire de l’alcool. Ils font d’ailleurs beaucoup d’émules. Nous les avions tracés en France, bien sûr, mais aussi en Suisse, en Belgique, au Canada. Ce sont de petites cellules, mais leurs membres ont le droit de lancer des fatwas individuelles. Une équipe repérée en 1998 était allée jusqu’à terroriser des membres de la Camorra en Italie.
Les nouveaux islamistes en Europe n’ont visiblement plus besoin de partir se former à l’étranger…
Il y aura toujours un djihadisme initiatique de ce type. Merah en est d’ailleurs la parfaite illustration. Mais, dans l’affaire Louis-Sidney, les premiers éléments recueillis semblent indiquer qu’un phénomène d’autoradicalisation s’est développé de façon inquiétante. Sur le sol français, les cellules agrègent des individus qui ne sont pas passés par les camps en zone pakistano-afghane ou ailleurs. Il y a une rapidité dans la mutation des réseaux qui me sidère. Et sans doute les services antiterroristes ont-ils négligé cette évolution. Et pas seulement en France. J’ai été frappé, pour ma part, par cette manifestation de salafistes, en septembre dernier, devant l’ambassade des États-Unis à Paris. Elle est, à mon sens, la première manifestation visible d’un enracinement en profondeur de l’islamisme radical dans nos sociétés occidentales et de sa capacité à mobiliser, notamment via les réseaux sociaux. (…)
Le Figaro

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