Bruno de la Palme explique pourquoi la gauche française a fait l’erreur de considérer le sujet de l’immigration comme un pré carré de l’extrême droite. Extraits de “100 ans d’erreurs de la gauche française, va-t-elle recommencer ?” (2/2).
Pour les socialistes, le thème de l’immigration est tabou, car il appartient à l’extrême droite. On n’a donc pas le droit d’en discuter. Circulez, il n’y a rien à voir ! Gare à celui qui évoquerait le moindre problème sur le terrain à ce sujet. Le voile pudique médiatico-politique a ainsi recouvert la réalité de l’immigration pendant des décennies, confortant justement le Front national. Le parti de Le Pen, qui a réussi dans les années 70 à regrouper des groupuscules d’extrême droite d’essences fort différentes voire opposées, a prospéré en faisant de l’immigration son cheval de bataille.
Ses arguments chocs étaient ouvertement racistes et simplistes. Mais en refusant simplement d’en parler, toute la classe politique lui donnait raison. Nier qu’une immigration massive de nature culturelle et religieuse profondément différente de celle des Italiens et des Polonais au début du XXe siècle, puis des Portugais et des Espagnols dans les années soixante puisse poser des problèmes spécifiques, revenait à refuser de voir qu’il fait jour à midi. Cela offrait à Jean-Marie Le Pen la statue du commandeur de celui qui est le seul à oser en parler et lui ouvrait une autoroute électorale.
Le Front national a donc engrangé logiquement les voix de tous ceux qui vivaient sur le terrain une réalité aux antipodes des poncifs positivistes énoncés dans les beaux quartiers de la capitale. (…)