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Le temps semble de plus en plus loin où le Japon apparaissait, aux yeux de la Vieille Europe, comme un “miracle” de développement économique et d’innovation technologique. Dans les années 1970-1980, les industries automobiles et électroniques nippones étaient, sans conteste, les championnes du monde dans leur domaine. Et faisaient du pays la deuxième puissance économique de la planète.

Ce temps est bien révolu. Après des deux décennies dites “perdues” (1990 et 2000), chaque semaine apporte désormais son lot de nouvelles moroses du côté de Tokyo ou d’Osaka. Les fleurons de l’industrie électronique grand public nippone ne sont pas les dernières touchées par la stagnation.

Ainsi, le 1er novembre, c’est Sharp qui a annoncé des pertes inquiétantes pour 2012-2013, en raison des mauvaises ventes de ses télévisions à écran plat à cristaux liquides, rudement concurrencés par les sud-coréens et taïwanais. L’avenir même du groupe semble menacé.

La veille, c’est Panasonic qui affichait des prévisions de pertes abyssales pour cette année, après d’aussi mauvais résultats l’an dernier. Et Sony, s’il s’en sort un peu mieux, accuse le coup des rétorsions décidées par la Chine envers son partenaire commercial après la “nationalisation” des îlots inhabités Senkaku.

Très dépendants de leurs ventes en Chine, le premier marché automobile mondial, la situation est aussi alarmante pour les constructeurs automobiles : ils pâtissent cruellement de la crise diplomatique avec Pékin. La campagne anti-japonaise en Chine s’est traduite par une chute brutale des ventes de Honda, Toyota et Nissan, au profit notamment du sud-coréen Hyundai Motor et de l’allemand BMW.

L’effet du boycottage du puissant voisin se ressent aussi sur le tourisme. Les voyageurs chinois boudent cette année le spectacle du “koyo “, ce moment exceptionnel où, dans tout l’Archipel, les arbres prennent des teintes pourpres et dorées. Septembre devait être l’occasion de célébrer les 40 ans de la normalisation des relations diplomatiques entre les deux principales économies asiatiques. Mais les festivités ont été annulées.

La crise sino-japonaise est donc un puissant révélateur des fragilités de l’Archipel, plus d’un an après le choc du tsunami et de la catastrophe nucléaire de Fukushima.

En effet, elle met à nu les tendances lourdes qui minent le dynamisme japonais. A la stagnation économique, au vieillissement démographique et à l’érosion de la capacité d’innovation technologique, s’ajoute l’affaiblissement sans fin du système politique.

Trois ans après l’arrivée des démocrates au pouvoir, mettant un terme à un demi-siècle de domination du Parti libéral-démocrate, la classe politique japonaise semble de plus en plus paralysée face aux défis du pays. Devant l’émergence de la Chine, l’Archipel doit pourtant inventer un nouveau modèle, sans se replier sur lui-même et céder aux tentations nationalistes.

Le Monde

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