Interview de Malika Sorel, membre du Haut Conseil à l’intégration, auteur de plusieurs livres sur l’immigration. [extraits]
Depuis des années, les politiques se comportent comme si les phénomènes migratoires actuels étaient comparables aux migrations intra-européennes du passé alors qu’évidemment, il n’en est rien.
Intégrer des Russes, des Polonais ou des Italiens – avec qui la France partage les mêmes racines culturelles et religieuses, une certaine conception de la cité héritée des Grecs – n’a strictement rien à voir avec la difficulté à intégrer des populations qui ne partagent ni ses racines ni ses principes.
En refusant de reconnaître qu’on était face à des processus d’intégration distincts, on a persisté à ignorer les problèmes de fond. (…)
Ce n’est pas parce qu’on naît en France qu’on se sent français
Dans les années 1980, beaucoup des enfants d’immigrés, nés en France, ne s’y sentaient pas bien. (…) On a refusé de regarder la vérité en face ; celle qui consistait à admettre que ce n’est pas parce qu’on naît en France qu’on se sent français. (…)
L’explosion des flux migratoires a favorisé le réenracinement culturel des enfants issus de l’immigration et explique qu’aujourd’hui, de plus en plus de gens se désinsèrent de la société et rejettent ses principes.
L’explosion des flux migratoires a favorisé le réenracinement culturel des enfants issus de l’immigration.
C’est une réalité : à partir du moment où l’on réimporte en masse certains modes de vie et certains comportements, où l’on réinjecte dans certains groupes des codes qui ne sont pas ceux de la société française, on favorise la désintégration sociale.
Le phénomène est frappant en qui concerne les musulmans de France chez qui on constate une véritable recrudescence de la pratique religieuse. Il y a encore quelques années, cette ferveur et cette rigueur religieuse n’existaient pas. Aujourd’hui, les derniers arrivés, quel que soit leur âge, s’érigent en juges et exercent une pression morale sur ceux qui étaient en voie d’insertion – le phénomène est particulièrement visible à l’école – en cherchant à leur imposer une culture qui n’est plus la leur et une vision du monde qui n’est tout simplement pas en phase avec les règles de vie et les principes de la société française.
En naturalisant à tour de bras des gens qui ne sont pas français et qui n’adhèrent en rien à la culture française, on a institutionnalisé l’idée de Français de papiers. On peut aujourd’hui être français de fait mais ne rien avoir en commun avec la société française.
En naturalisant à tour de bras des gens qui ne sont pas français et qui n’adhèrent en rien à la culture française, on a institutionnalisé l’idée de Français de papiers. Et ce faisant, on a décorrélé identité et nationalité.
Si bien qu’on peut aujourd’hui être français de fait mais ne rien avoir en commun avec la société française. Ni le mode de vie, ni les principes, ni le projet ce qui, selon moi, confirme l’idée que nous sommes dans une situation de désintégration sociale.
Ce qui guide l’action politique depuis des années est avant tout la volonté d’acheter la paix sociale. Pour l’obtenir, des élus sont allés jusqu’à contourner la loi de 1905 qui interdit le financement de lieux de culte par l’Etat pour financer des mosquées, jusqu’à accepter l’instauration de cantines halal, ce qui, pour un pays qui a fait la guerre à l’Eglise, revient à imposer aux gens de financer un culte ! (…)
A force de cultiver le registre de la repentance, on a fini par totalement déprécier la notion d’identité française.
Depuis des années, on renonce à nommer les difficultés. Exemple : le fait qu’on s’interdise de nommer un phénomène tel que le racisme anti-Blancs qui est pourtant une réalité avérée dans certains quartiers où les flux migratoires ont abouti à une absence totale de mixité. Mais le nombre n’explique pas tout.
Si le phénomène est désormais visible, c’est qu’il va de pair avec la dépréciation de l’identité française par les politiques eux-mêmes qui, à force de cultiver le registre de la repentance et à force de concessions consenties au fil du temps au respect de la diversité, ont fini par totalement déprécier cette notion d’identité française. Par la vider de son contenu et par la charger d’une image dégradée. (…)
Les gens qui immigrent aujourd’hui ne le font pas pour rejoindre la France en tant que terre d’accueil mais pour rejoindre leur diaspora et vivre entre elles, en recréant ailleurs leur communauté d’origine.
Et pendant ce temps, on en vient à traiter de racistes des Français qui revendiquent les principes d’égalité, de liberté et de laïcité et qui, en leur nom, refusent le voile ou le halal à l’école. Ce décalage entre deux réalités est pour moi extrêmement inquiétant. (…)
Pour moi, une grande partie des problèmes que nous connaissons actuellement s’explique par un dysfonctionnement démocratique. Cela fait des années que je travaille au sein des institutions politiques et je le vois : l’Ena est une caste qui fabrique des politiciens. Autrement dit, des clones qui ont instauré un système de réseautage, de cooptation et au fond de privilèges, et qui, les uns après les autres, perpétuent le système. Des gens qui ne connaissent rien aux réalités du terrain. Et pourtant, ce sont ces gens qui donnent le la. La politique ne devrait pas être un métier. (…)
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