Dans ses plaidoyers inlassables en faveur de l’islam modéré, l’anthropologue Malek Chebel s’interroge sur les moyens de corriger l’image menaçante du monde musulman qui ne cesse de grandir au sein des nations occidentales. Deux causes principales contribuent, selon lui, à créer les conditions de ce qui pourrait devenir un véritable choc de civilisations.
C’est, d’un côté, la faiblesse des sociétés démocratiques devant la stratégie terroriste d’un islamisme radical qui exerce sur les esprits faibles la même fascination que le romantisme fasciste au XXe siècle ; et c’est, de l’autre, l’absence d’organisation d’une protestation des modérés, au sein même de l’islam.
Ces réponses sont, en fait, plutôt des questions, étroitement liées l’une à l’autre: les sociétés démocratiques sont en effet d’autant plus faibles, devant les défis que l’islam lance à leur modèle laïque, que les musulmans modérés eux-mêmes sont désarmés devant la lecture radicalisée que les islamistes donnent du Coran.
Comment remettre en cause un texte qui, à la différence des Evangiles signés de simples humains, est considéré comme la parole même de Dieu?
Seule l’application rigoureuse de la loi laïque, excluant l’intrusion du religieux dans l’espace du politique, peut garantir les démocraties contre un prosélytisme fanatique devant lequel les docteurs de la foi sont, eux-mêmes, impuissants. Cette spécificité de l’islam, la France coloniale n’a jamais su la comprendre.
A l’époque coloniale, cette ignorance a été en grande partie responsable du mur d’incompréhension qui finit par rendre irréconciliables les Algériens dits alors «de souche» et ceux qu’on n’appelait pas encore les pieds-noirs. (…)