François Fiévet, essayiste, regrette ce qu’est devenu Noël et pense avec nostalgie au Noël de son enfance.
Curieusement, médias et publicités ne parlent que de Noël. Mais qu’est-ce que cela veut dire Noël ? On entend le mot fêtes. Mais les fêtes de quoi ? La fête du Père Noël ? Qui est-il celui-là ? Je ne peux pas croire que Jésus ait été effacé de la mémoire des gens. Il me semble qu’on l’a tout bonnement oublié : pourtant, c’est sa fête à lui !
C’est l’hiver, dans la nuit, la neige épaisse étouffe les sons, la forêt est calme et figée par l’air glacial. Disparaissant dans la pénombre, les traces des lapins blancs des montagnes zigzaguent entre les grands mélèzes.
Sorties de la messe de minuit, emmitouflées dans les anoraks, toutes les familles s’arrêtent devant la crèche, construite par les gars du village, avec des blocs de glace, en forme d’igloo décoré de jolies bougies rouges. Une chorale d’enfants entonne des chants de Noël chrétiens. Avec mes frères et sœurs, fascinés, nous restons quelques instants, bouches bées, si proches de ce petit enfant couché dans une pauvre mangeoire, entre ses parents.
Le bœuf et l’âne, les bergers avec leurs brebis sur les épaules et les rois mages offrant la myrrhe et l’encens. Quelques flocons tombent en virevoltant et tout est harmonie dans le ciel et sur la terre… Cette image de paix et d’amour est profondément gravée dans ma mémoire. […]
Cinquante années plus tard, je suis toujours cet enfant aux yeux émerveillés devant la pauvre crèche qui recevra le Seigneur notre Dieu, dans la nuit Sainte. Mais quand je marche dans la ville, c’est le grand déballage, l’orgie, la profusion de produits de consommation, camouflés dans des emballages d’or et de lumières. Les magasins rivalisent de luxe, de sapins géants remplis de boules rouges et de neige électronique. Et partout, cet odieux personnage issu de la publicité américaine, le Père Noël, avec sa fausse barbe ridicule et son habit rouge vif. […]
Boulevard Voltaire (Merci à Alexandra)