Article de Emilienne Malfatto, 23 ans, qui étudie le journalisme à Sciences Po Paris, sur Ianis et Larissa, des «Roumains» les «invisibles de la Bastille».
Le racisme envers les Roumains et les Roms est devenu ordinaire, on ne s’en cache pas. Ce racisme-là est un peu comme l’antisémitisme d’il y a un siècle : il ne choque pas tant que ça.
Ils vivent dans la rue. Assis sur le sol, à hauteur des poussettes et des chiens. Pour les autres, tous les autres, ils n’existent pas. Ils sont invisibles. Tout juste génèrent-ils un soupir – agacé ou désolé – parfois une pièce, un sandwich. Ils sont Roumains. Souvent Roms, pas toujours. […]
Je parle mal roumain, son français est pire encore, mais nous parvenons à nous comprendre. Avec deux amies, nous allons au supermarché faire des courses pour Larissa. Du basique. Eau, pain, bananes, gâteaux. Une manière comme une autre d’aider. Une manière aussi de s’acheter une bonne conscience, peut-être. […]
À quoi bon apprendre le roumain, m’a-t-on raillée récemment, «tu veux parler aux petits mendiants de Paris peut-être ?» Il faut dire qu’à la capitale, les Roumains ne sont pas aimés. Faites l’expérience de prononcer le mot «roumain» dans le métro. Hostilité et paranoïa, au mieux pitié. […]
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