Jacob Joardens (1593 – 1678), Le Roi boit, v.1640.
À l’origine, L’Épiphanie, fait partie du cycle de Noël et tire son fond et son sens des célébrations païennes de la Lumière. En effet, Noël, avant d’être un jour, est d’abord un cycle. Celui-ci atteint son apogée au jour marquant le solstice d’hiver, le 22 décembre.
Cette nuit du solstice — la plus longue de l’année — annonce le rallongement des jours et — par extension — la renaissance de la Lumière censée être à l’origine de toutes choses.
Puis la célébration se prolonge durant un nombre de jours hautement symbolique : 12 jours et 12 nuits. Le nombre 12 représentant entre autres la Totalité (12 mois, 12 heures, 12 Dieux Olympiens, 12 Tribus d’Israël, 12 Apôtres, etc.) Le cycle prend fin le 6 janvier. C’est à ce moment que les jours commencent à s’allonger de façon sensible, que la promesse de la nuit solsticiale est tenue. On célèbre alors l’Épiphanie, la manifestation de la Lumière. Par sa forme ronde et sa couleur dorée, la galette symbolise le soleil.
Il est à noter également que c’est ce jour (en tout cas son équivalent, car le calendrier alors en vigueur — le calendrier julien — diffère du nôtre) qu’avait lieu sous la Rome antique la fête des 12 Dieux Épiphanes (autrement dit les 12 Olympiens).
La date de l’Épiphanie correspond aussi à l’origine à une fête païenne : sous l’antiquité, les Romains fêtent les Saturnales qui durent 7 jours pendant lesquels la hiérarchie sociale et la logique des choses peuvent être critiquées sinon brocardées et parodiées.
À cette occasion, par exemple, les soldats tirent au sort, grâce à une fève, un condamné à mort qui devient “roi” le temps des réjouissances. Une fois les Saturnales achevées, la sentence est exécutée. Parmi les jeunes soldats, un roi est élu et peut commander tout ce qui lui plaît. Peut être opéré un changement de rôle uniquement durant la fête des Saturnales entre le “maître” et l'”esclave” déterminé ou non par tirage au sort.
En trouvant sa place le jour de l’Épiphanie, cette tradition a évolué et perdure au cours des siècles. Le christianisme a repris tout ce fonds symbolique en assimilant la lumière au Christ, puisqu’il est annoncé comme étant « la parole qui éclaire le monde ».
L’Épiphanie chrétienne célèbre ainsi que le rapportent l’évangile et la Tradition : la manifestation publique du Fils de Dieu incarné (Jésus) au monde, non pas comme dans la mythologie grecque à partir d’une révélation extérieure à l’humanité et faite sous les apparences de l’humanité, mais sous la forme d’un enfant engendré, en un temps historique donné, au sein du peuple juif (dans la lignée de David).
Le messie, qui — après avoir rencontré les petits et les proches (les bergers) — prend place et rencontre le monde dans toute sa diversité, telle qu’elle est symbolisée par des mages, que l’on dit être rois ou savants, de toutes races (l’un est noir ) et venus de pays lointains (situés à l’Est de l’Orient). Ainsi est réaffirmée la dimension universelle du message évangélique.
Depuis le XIVe siècle, on mange la galette des Rois à l’occasion de cette fête. La tradition veut que l’on partage la galette en autant de parts que de convives, plus une. Cette dernière, appelée « part du Bon Dieu », « part de la Vierge » ou « part du Pauvre », est destinée au premier pauvre qui se présenterait au logis.
Selon l’usage actuel, la traditionnelle fève est accompagnée ou remplacée par un petit sujet caché à l’intérieur de la pâte de la galette des Rois. La personne ayant dans sa part la fève est symboliquement couronnée roi ou reine et doit offrir la prochaine galette ; quant à celui qui a le sujet, il doit offrir la boisson (mousseux, muscat, ou champagne selon la bourse… ).
Lorsqu’il y a des enfants, l’un d’entre eux – en général le plus jeune – doit se placer sous la table et, tandis que la personne qui fait le service choisit un morceau, l’enfant désigne le destinataire de cette portion.
On trouve des coutumes similaires en Espagne, au Portugal (Bolo Rei) et dans les pays d’Amérique latine : Le Día de los Reyes Magos y est souvent un jour férié et les enfants y reçoivent leurs cadeaux plutôt qu’à Noël.
En Belgique et aux Pays-Bas : on mange également une galette à la pâte d’amande. Le plus jeune se cache sous la table pour désigner les parts et le roi du jour choisit sa reine. Pendant la journée les enfants parcourent les rues en chantant la chanson de l’étoile et font du porte à porte pour recevoir des mandarines et des bonbons. Cette coutume tend à disparaître en Belgique. Dans les campagnes flamandes cela se fait encore. Notons au passage qu’en Wallonie, c’est à ce moment qu’on commence la préparation du Carnaval.
Dans le sud des États-Unis la tradition de tirer les Rois existe sous le nom de king cake. Ceux-ci sont mangés pendant toute la période qui va de l’Épiphanie jusqu’au carnaval de mardi gras, le 6 janvier.
En Grèce et à Chypre, il n’y a pas de galette « des rois » à proprement parler. La Vassilopita est aujourd’hui une galette en l’honneur de saint Basile de Césarée. Cette galette est préparée la veille du nouvel an et ce n’est qu’au 1er janvier, jour anniversaire de la mort du saint qu’elle est coupée. On y dispose traditionnellement une pièce en or, mimant ainsi une disposition que fit adopter le saint pour répartir de manière égale la rançon non utilisée pour stopper le siège de Césarée.
Toutefois, l’origine de la tradition byzantine remonte très certainement aux Kronia de la Grèce antique et aux Saturnales de Rome, comme l’a démontré l’anthropologue Margarett Hasluck.
Fêtes locales
Selon les pays, des festivités particulières issues de traditions locales, sont organisées. Ainsi, en Bulgarie, les hommes exécutent une danse traditionnelle, le horo, dans l’eau glacée.
Prénoms fêtés
C’est le jour de l’Épiphanie que l’on fête les Tiphanie (en français), Tifenn (en breton), Tiffany (en anglais) ou Théophano, Théano (en grec). Ce prénom correspond en effet au mot Théophanie, ou manifestation de Dieu, autre nom de la fête. On fête les Jordan et les Jordane. On fête aussi les Noël … s’ils sont Arméniens.
Durant les quatre premiers siècles de l’histoire chrétienne, l’Église avait l’habitude de fêter le 6 janvier toutes les manifestations de Dieu sur la terre : la Nativité (Noël), l’Adoration des mages, le baptême du Christ et les noces de Cana. Le changement de l’eau en vin et la multiplication des pains (ou Phagiphanie) étaient ainsi commémorés par une même fête avec la Nativité.
Les fêtes ont ensuite été dissociées : pour le 6 janvier, les Latins ont retenu l’Adoration des mages et les Grecs le Baptême du Christ. Les Éthiopiens et les Arméniens ont conservé une fête unique pour la célébration de Noël, le 6 janvier pour les Arméniens et le 6 ou le 7 janvier pour les Éthiopiens en fonction du calendrier.
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