Atlantico : Dans votre dernier bloc-notes de 2012, consacré au succès de la blogosphère de droite, vous suggérez, comme souvent, que la gauche exerce sur la vie médiatique et intellectuelle française une emprise intolérable. Pourquoi ne pas y voir, tout simplement, une attractivité supérieure des idées assimilées à la gauche ?
Gilles-William Goldnadel : Tout d’abord, sérions les questions : sur l’impérialisme de la gauche intellectuelle, il ne me viendrait pas à l’idée de reprocher au Monde, à Libération ou aux Inrockuptibles d’être de gauche et donc de véhiculer “une pensée”.
Ce que je considère, en revanche, comme effectivement intolérable – et qui est pourtant considéré comme normal – c’est le manquement du service public audiovisuel de l’information à son obligation de neutralité. Le personnel de France Inter, France 2 et 3, d’Arte – et c’est vrai que je l’ai dit, écrit et que je le répéterai ad nauseam – trouve parfaitement normal de laisser transparaître, de manière quasi unanime, sa “sensibilité de gauche”, revendiquée à plusieurs reprises. Pour moi c’est un manquement déontologique à l’égard d’une partie des Français qui payent une redevance. (…)
Ajoutez à cela des artistes qui se sont toujours présentés sous leur meilleur profil (de l’occupation à aujourd’hui, on sait que la réalité est évidemment moins attrayante) qui n’ont pas une réflexion ou une culture très impressionnante et vous pouvez comprendre le produit soi-disant culturel qui a été présenté aux deux dernières générations d’occidentaux. Et c’est encore beaucoup plus important que l’information biaisée.
C’est quoi un film américain de politique fiction produit par Hollywood depuis des années ? Un complot dans lequel est fatalement mêlée la CIA. C’est quoi un film social français des années 2000 ? Une histoire dans laquelle un bon bourgeois culpabilisé vient en aide à un sans-papiers menacé d’expulsion. C’est quoi un vidéo-clip de rap en boucle ? Un noir révolté, entouré de femmes soumises et dévêtues, très en colère contre les flics français racistes. Et ça fait 30 ans que ça dure.
Nous ne sommes pas dans le domaine des idées et de la réflexion, nous sommes dans celui des fantasmes construits et de la perception imposée.
Ce qui caractérise, le matraquage permanent post marxiste, c’est que nous sommes plus dans le domaine d’une théorie dogmatique et argumentée mais au contraire dans la non pensée moralisatrice et obligatoire.
Une sorte de bouillon clairet et insipide de sous-culture anti-occidentale, qui lave le cerveau, et dont les seules épices pour donner du goût sont les adversaires à détester religieusement : comme, par exemple, le raciste franchouillard hétérosexuel et homophobe.
J’ai expliqué dans “ma réflexion sur la question blanche” qu’il s’agit d’une tragique perversion du choc de cette Shoah dont le responsable serait l’Etat-nation occidental.
Mais quel rapport avec la gauche ?
C’est l’extrême gauche après 68 à la fois antiétatique et tiers-mondiste qui a véhiculé cette thématique perverse. Elle ne s’est plus appuyée sur la théorie marxiste qui avait manifestement échoué lamentablement partout, et elle a appliquée, sans doute sans le savoir, les théories gramscistes de la prise du pouvoir non plus par la force ou par les urnes mais en subvertissant les consciences. Sa réussite est exceptionnelle. Je ne parle pas seulement de ce qu’elle a converti largement l’ensemble de la gauche française, je parle de la sidération et de la culpabilisation des esprits par la création d’un surmoi tétanisant.
Je parle enfin de la déstructuration de la société française et même de l’individu attaqué non seulement dans son identité culturelle, nationale mais encore aujourd’hui sexuelle par l’élaboration des théories du genre.
Pour lui résister et tenter de renverser ce formidable courant peut être irréversible, il faut procéder par l’imitation de leur procédé d’intimidation. (…)
Atlantico