En Europe, 50 % des aliments finissent à la poubelle. Des solutions simples existent pourtant contre le gaspillage alimentaire. A Herstal, en Belgique, les grandes surfaces n’ont désormais plus le droit de jeter leurs invendus. Une expérience qui commence à se diffuser dans tout le pays.
Et si pour lutter contre le gaspillage alimentaire, on faisait preuve d’un petit peu d’imagination ? A Herstal, ville de 40 000 habitants de la banlieue de Liège (Belgique), le supermarché Carrefour n’a désormais plus le droit de jeter ses invendus. Il doit en faire don aux associations d’aide alimentaire.
Une obligation à laquelle seront bientôt soumis la quinzaine de supermarchés de la ville. Le principe est très simple : en Belgique, un « permis d’environnement » – intégrant toutes les autorisations environnementales – est requis pour exploiter une entreprise. Lors du renouvellement du permis d’environnement du supermarché Carrefour, le conseil municipal y a intégré l’obligation de mettre les invendus à disposition des associations.
« Ces permis arrivent régulièrement à échéance. Nous y avons vu l’opportunité d’y insérer cette disposition, explique le maire de la ville, l’eurodéputé (socialiste) Frédéric Daerden. Les magasins sont alors obligés de proposer aux associations reconnues par la banque alimentaire les invendus encore consommables, avant de les mettre dans la filière déchets si celles-ci ne les récupèrent pas. »
Les responsables locaux ont voulu systématiser une pratique aujourd’hui occasionnelle, et surtout la rendre obligatoire pour toutes les enseignes. Cette décision peut s’appliquer à tous les commerces de plus de 1 000 m2 de superficie, soumis au permis d’environnement.
Peu de moyens pour contrôler les supermarchés
Au supermarché de s’organiser pour stocker la nourriture invendue dans un espace dédié, où les associations peuvent venir la récupérer. « Cela peut causer un peu de travail supplémentaire. Ce qui explique qu’il puisse y avoir quelques résistances », explique Frédéric Daerden. Les grandes surfaces peuvent-elles s’opposer à cette décision ? « Elles peuvent déposer un recours, mais elles seront peu nombreuses à le faire », poursuit le maire. Question d’image, sans doute.
Reste qu’en cas de non respect de la disposition, les moyens de pression et de sanction sont faibles. La ville ne peut pas exercer des contrôles réguliers : il est nécessaire que la banque alimentaire signale les enseignes ne respectant pas leurs obligations. Et les sanctions ne dépendent pas de la municipalité, mais de l’échelon régional. De quoi compliquer un peu cette mesure anti-gaspillage, si les grandes surfaces traînent des pieds.
Vers une législation européenne ?
Autre limite : certaines enseignes centralisent les invendus, renvoyés par chaque magasin. Difficile dans ce cas d’intervenir dans le processus. Pour éviter des « lourdeurs administratives » liées aux contrôles sanitaires, la ville discute actuellement avec l’Agence pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA) pour alléger les procédures, puisque banques alimentaires et supermarchés sont déjà soumis aux contrôles de l’Agence.
Malgré ces limites, la simplicité de l’initiative séduit de nombreux élus. La ville de Namur (110 000 habitants) s’apprête à suivre l’exemple. Frédéric Daerden réclame le vote d’une loi au niveau wallon, voire la généralisation au niveau européen. L’enjeu est de taille : près de 50 % des aliments sains sont gaspillés chaque année en Europe, par les ménages, les supermarchés, les restaurants, l’industrie agro-alimentaire.
Alors que 79 millions de citoyens européens vivent au-dessous du seuil de pauvreté, et que 16 millions dépendent de l’aide alimentaire. En France, le gaspillage par le secteur de la distribution est estimé à 197 tonnes par établissement chaque année. Si rien n’est fait pour changer nos pratiques, le gaspillage alimentaire augmentera de 40 % d’ici 2020, selon une étude de la Commission européenne. Pour inverser la tendance, des mesures simples existent pourtant.
Bastamag