Selon Pierre Beylau, l’assassinat de l’opposant Chokri Belaïd illustre le chaos dans lequel est plongé le pays sous la férule des islamistes.
Osons proférer une évidence : la situation du pays est bien pire que sous Ben Ali. Il ne s’agit pas ici de défendre la kleptocratie instaurée par l’ancien dictateur, mais de prendre en compte la réalité telle qu’elle est.
C’est une fatalité de l’histoire : les révolutions commencent dans un enthousiasme convivial et se terminent en sanglante tragédie. […]
La Tunisie, pays ouvert aux portes de l’Europe, était censée montrer le chemin vers un printemps arabe, vers une démocratie nimbée de valeurs islamiques.
Sur le papier, le gouvernement tunisien est pluraliste. Les islamistes, qui ont remporté 40 % des voix aux élections, se sont alliés à deux petits partis de centre gauche pour constituer une majorité. Le Premier ministre Hamadi Jebali, membre d’Ennahda, passe pour relativement modéré. Le président, Moncef Marzouki, est un vrai démocrate. Problème : la réalité du pouvoir est détenue par les islamistes, qui contrôlent tous les ministères régaliens. Avec dans la coulisse l’ombre omniprésente de Rached Ghannouchi, le chef réel d’Ennahda qui tire les ficelles derrière le paravent. […]
L’islamisme des Frères musulmans était, pensait-on, soluble dans la démocratie. Le «modèle turc» servait de viatique. Problème : du Caire à Tunis, ce sont les phalanges de l’ordre noir, les islamistes les plus bornés, qui tiennent le haut du pavé. Sans parler de la Turquie d’Erdogan qui a enclenché une marche arrière inquiétante sur le plan des libertés et de la laïcité.
Le Point (Merci à natacha3)