Guy Konopnicki revient sur une étude d’opinion selon laquelle près d’un tiers des Français approuvent les idées du Front national.
Les gens moyens commencent à intéresser les politiques quand ils menacent de mal voter. C’est alors que la droite reprend à son compte les idées de l’extrême droite. Aussitôt, la gauche, ravie, dénonce cette dérive honteuse. Il en est ainsi depuis trente ans.
Ne sortez pas votre mouchoir, il n’est pas encore temps de pleurer, Alain Rémond me pardonnera cet emprunt à Bob Dylan. Les commentaires attristés de ce sondage me renvoient à un incident banal, auquel j’ai assisté dans le métro.
A la station Strasbourg-Saint-Denis, sur ma chère ligne 9, quelques places assises se libèrent. Une dame assez âgée pour être fatiguée, mais suffisamment jeune pour rentrer du travail, tente de s’approcher, mais elle est bousculée par trois ados pressés de se vautrer sur les banquettes. Ne sortez toujours pas vos mouchoirs… La victime proteste. L’un des gamins lui adresse un geste des plus grossiers, l’autre balance un groupe de mots, qui, sans constituer une phrase, ressemble à un ordre confirmant le geste. Dans les deux langages, la dame se voit sommée de présenter ailleurs les fesses qu’elle entendait poser à la place des leurs. Elle s’éloigne et lance à la cantonade : «Vivement Le Pen !» Ne sortez pas vos mouchoirs, il n’est pas encore temps…
Une femme légèrement plus jeune s’indigne : «Madame, vous devriez avoir honte ! Vous êtes raciste ! Ce n’est pas parce qu’ils sont…» Je censure. Qui parle de l’origine de ces jeunes ? La dame bousculée ? Non, celle qui lui reproche de voter Le Pen ! Attendez encore pour les mouchoirs.
Les politologues invités à commenter la progression des idées du FN égrènent les causes que nous connaissons déjà. Le sentiment d’abandon exprimé par les ouvriers, les agriculteurs, les artisans et les petits commerçants. Cet abandon se traduit dans le vocabulaire : on ne parle plus des classes laborieuses, mais des classes moyennes. […]
Marianne (Merci à Zatch et Joyeux luron)