Avec la proposition de nouveaux règlements européens, des milliards d’insectes modifiés génétiquement pourront être lâchés sur des fruits et légumes. (consultation de l’EFSA sur l’évaluation des risques environnementaux d’animaux GM Août 2012)
L’organisation GeneWatch Royaume-Uni rejette le nouveau projet de règlement européen pour l’autorisation d’insectes, de poissons, d’animaux de fermes et domestiques génétiquement modifiés. [1]
La firme britannique Oxitec a déjà fait parler d’elle avec ses essais de moustiques transgéniques dans les Iles Caïman et en Malaisie et dernièrement avec des lâchers à grande échelle au Brésil [2], avec le soutien des autorités de ce pays. Cette même firme travaille sur des papillons et mouches génétiquement modifiés. Si ce nouveau projet de règlement européen était approuvé, ce sont des milliards de chenilles et d’œufs de papillons et insectes génétiquement modifiés qui pourraient se retrouver dans les fruits et légumes.
Les insectes ont été modifiés génétiquement afin que leurs chenilles meurent à l’intérieur des olives ou des tomates ou sur les feuilles des choux. [3] La compagnie Oxitec prévoit de relâcher ses ravageurs modifiés génétiquement partout dans l’Union européenne afin qu’ils s’accouplent avec leurs congénères sauvages dans le but d’en réduire le nombre. Afin d’avoir un effet sur les populations sauvages, il faut procéder chaque semaines à de nouveaux lâchers d’insectes GM.
La menace est très sérieuse. Après les lâchers massifs de moustiques GM au Brésil dans des conditions qui ne peuvent qu’inquiéter, Oxitec pourrait être très bientôt actif en Espagne.
Un des principaux ravageurs pour les oliviers est la mouche de l’olivier (bactrocera olea). Chaque année les producteurs d’huile essayent de réduire la présence de ce ravageur par des épandages aériens et des mesures de contrôles au sol comme les phéromones.
Oxitec a déjà développé des mouches de l’olivier mâle qui sont modifiées génétiquement de façon que leurs descendants meurent.
L’ébauche de cadre, publiée pour consultation par l’EFSA, exclut spécifiquement tout test pour savoir si les insectes et chenilles modifiés génétiquement présentent un risque alimentaire.
Pour Helen Wallace : « Personne ne veut manger des chenilles GM mortes ou en train de mourir dans ses olives ou ses tomates. Et personne ne sait si les ravageurs GM qui sont encore vivants vont se retrouver dans le jardin ou dans le champ du paysan du coin. Ce que propose l’EFSA, c’est une partie de poker avec notre alimentation et l’environnement. »
GeneWatch Royaume-Uni a écrit à la Commission européenne pour dénoncer le rôle qu’Oxitec et Syngenta, le géant mondial des pesticides, jouent dans la rédaction des nouvelles règles, et pour poser la question de la compétence qu’a l’EFSA pour rédiger des lignes de conduite sur des problèmes qui ne sont pas de son domaine [4]. Syngenta a financé Oxitec pour développer des ravageurs agricoles GM et la majorité des cadres et des membres du conseil d’administration d’Oxitec sont des anciens de Syngenta. Lors de la consultation, GeneWatch a mis en évidence dans sa réponse, la manière dont les compagnies ont déformé l’ébauche de cadre pour favoriser les autorisations d’insectes GM à utilisation commerciale.
Toujours selon Mme Wallace : « Les compagnies qui espèrent gagner de l’argent en jouant avec la santé des gens et l’environnement, écrivent elles-mêmes leurs propres règles. A quoi sert une autorité de sécurité des aliments qui ne veut pas faire son travail ? »
Les points qui inquiètent GeneWatch sont les suivants :
– L’EFSA affirme que les risques alimentaires des insectes présents dans les aliments ont été abordés lors d’une précédente consultation qui en fait les a explicitement rejetés
– L’EFSA n’explique pas comment on pourrait empêcher des œufs d’insectes ou de poissons GM de se retrouver au mauvais endroit et de nuire à l’environnement
– L’EFSA a essayé de changer son domaine d’action et d’y inclure les prétendus « avantages » (réduction de l’usage des pesticides) : cela ne fait pas partie du rôle de l’EFSA dans la réglementation européenne.
– L’environnement naturel va s’adapter aux lâchages d’insectes GM avec des réponses complexes qui ont été ignorées, alors que la réduction d’un ravageur par la méthode Oxitec peut rendre les problèmes avec un autre ravageur encore pires.
– les impacts des insectes GM sur les maladies touchant humains et animaux sont très mal compris et n’ont pas été correctement pris en compte.
– L’EFSA a ignoré (i) les risques qu’il y a à relâcher plus d’un type d’insecte GM dans une même zone (ii) les projets d’Oxitec de combiner les ravageurs GM avec les plantes GM comme méthode pour essayer de ralentir la progression de la résistance des ravageurs aux plantes insecticides GM (plantes Bt)
– le lâchage de poissons GM pourrait avoir de graves conséquences pour les poissons sauvages et pour l’environnement.
– on continue d’ignorer le fait que des animaux de ferme GM perdent spontanément leurs petits ou mettent bas des animaux déformés ou morts nés. La commercialisation des animaux GL passe avant le bien être animal.
Notes :
[1] La réponse de GeneWatch à la consultation de l’EFSA sur l’évaluation des risques environnementaux d’animaux GM Août 2012. : http://www.genewatch.org/uploads/f03c6d66a9b354535738483c1c3d49e4/EFSA_GWresponse.pdf
[2] Voir notre article : Moustiques transgéniques contre la “dengue”
[3] Voir par exemple, le dernier document scientifique d’Oxitec “Control of the olive fruit fly using genetics-enhanced sterile insect technique” ( http://www.biomedcentral.com/1741-7007/10/51/ ) On peut lire que la majorité des jeunes femelles de leurs mouches de l’olivier GM meurent au stade de nymphe. Cela se produit normalement avant que les mouches adultes ne sortent de l’olive dans laquelle les mouches ont posé leurs œufs. Dans son document, Oxitec propose que l’on considère cette « présence comme accidentelle » dans le cadre légal européen. Ce qui signifie que la présence dans les aliments, de tout insecte mort, en train de mourir ou survivant serait considérée comme accidentelle et ne nécessiterait ni règlementation, ni traçabilité, ni étiquetage pour les olives ou d’autres aliments. La majorité de la progéniture des insectes GM d’Oxitec meurt aux derniers stades de larve (c’est-à-dire chenille) ou au stade de pupe, mais certains individus atteignent le stade adulte. Actuellement, Oxitec modifie génétiquement des mineuse de la tomate GM, des teignes du chou (qui mangent les choux et les brocolis) et des mouches du vinaigre.
[4] Lettre ouverte à la Commission européenne : http://www.genewatch.org/uploads/f03c6d66a9b354535738483c1c3d49e4/Dalli_letter_EFSA.pdf