Alain Duhamel s’inquiète de la «soudaine radicalisation du débat politique français».
L’Europe est la seule solution, elle demeure le principal rempart mais elle accumule les lenteurs, les gaffes, les cruautés absurdes, les mesquineries bureaucratiques et surtout les cécités politiques. Elle manque de vision, d’énergie, de leaders, de réactivité.
En toile de fond sinistre, la montée du chômage avec son cortège de souffrances personnelles, de pathologies sociales, d’anxiété collective, de ressentiment vis-à-vis des gouvernants, de déception amère, notamment chez les électeurs de gauche qui ont porté au pouvoir une nouvelle équipe.
Au premier plan, la progression spectaculaire des votes d’extrême droite à l’occasion de l’élection législative partielle de l’Oise. Certains hiérarques sont tentés de la minimiser en assénant qu’il s’agit d’un cas atypique […].Billevesées : la réalité est tout autre et le Front national a bel et bien failli l’emporter avec 48,6 % des voix. L’extrême droite se fortifie, atteint un niveau qu’elle n’avait jamais obtenu et peut effectuer une nouvelle percée l’an prochain aux élections municipales et surtout européennes. Jamais, depuis justement les années 30, elle n’avait pesé aussi lourd. La crise la ressuscite. […]
L’imposante manifestation du dernier week-end contre l’ouverture du mariage et de l’adoption aux homosexuels a drainé une foule immense, nettement plus politisée qu’auparavant. Des petits groupes d’extrême droite ont testé des provocations brutales.
Une étape a été franchie. A côté de l’opposition politique et de l’effervescence sociale, voilà une contestation sociétale de masse qui entre en jeu. Symptôme supplémentaire de crise.
Le pire est à gauche, aux confins de la nouvelle et fragile majorité. […]
Jean-Luc Mélenchon, auto-intronisé tribun du peuple, a placé son exceptionnel talent oratoire et sa verve unique au service d’une stratégie de violence verbale sans cesse plus provocatrice et plus outrecuidante. […] Désormais, l’extrême gauche, c’est lui et il reprend sans vergogne les recettes des années 30, lorsque avant 1934 elles s’acharnaient plus sur la social-démocratie que sur les conservateurs. Il poursuit la chimère d’édifier son pouvoir sur les débris de la gauche réformiste. Résurgence d’un aveuglement jadis dévastateur. […]
Sur le continent, la xénophobie gagne, l’immigré redevient plus que jamais le bouc émissaire, la démagogie s’épanouit dans l’Europe latine. […]