Un ouvrage de Daniel Riolo, Racaille Football Club, analyse la rupture entre l’équipe de France et son public. Un constat implacable qui dépasse largement le cadre du sport. Le mal est plus profond. L’an dernier, un sondage révélait que seulement 20 % des amateurs de football affirmaient «avoir de la sympathie» pour les Bleus.
Directeur du centre de formation du Lille olympique sporting club (Losc), Jean-Michel Vandamme confirme la détérioration : «Il y a dix ans, je faisais 70 % de foot et 30 % d’éducation. Aujourd’hui, les formateurs font l’inverse. » […]
Mais de quels jeunes parle-t-on ? Directeur technique national, François Blaquart explique que «principalement, nos jeunes viennent de milieux urbains». Comprendre : des banlieues des grandes agglomérations. Ces « jeunes » que, souvent, l’opinion publique désigne comme des voyous, des « racailles ». Le lien est fait.
Le football, aujourd’hui, c’est la banlieue. Attirés par un rêve de réussite sociale bien plus que par l’amour d’un maillot, les jeunes des cités ont imposé leurs codes dans le football.
Dans Fractures françaises, le sociologue Christophe Guilluy décrit une France périurbaine ou rurale «qui en a ras-le-bol de l’équipe de France racailleuse, avec les écouteurs sur la tête».
Daniel Riolo estime que «si le foot, divertissement supposé faire oublier le quotidien, met précisément en scène les mecs qui génèrent le plus d’anxiété dans la vie de tous les jours, le rejet va vite se manifester».
Analysant ce mouvement, qui souligne, en creux, l’échec du modèle républicain d’intégration, si vanté en 1998 lors de la victoire en Coupe du monde, l’auteur revient sur le mythe mensonger de la France black-blanc-beur, sur l’édifiant France – Algérie du 6 octobre 2001, où l’autisme et l’aveuglement des responsables politiques s’étalèrent au grand jour. Et Riolo de rappeler qu’en dépit d’un grand nombre d’immigrés d’origine polonaise ou italienne, les France – Italie ou les France – Pologne d’antan n’avaient jamais donné lieu à un tel «spectacle».