L’Union Européenne est bâtie sur des critères économiques, politiques et géopolitiques. Elle doit être jugée selon ces mêmes critères. Et le verdict de l’historien britannique Niall Ferguson est sans appel.
« Au sein de l’Union européenne, il y a 23 façons de dire merci et je pense que cela illustre pourquoi l’expérience européenne s’est soldée par un échec. Vous rappelez-vous des expériences que vous faisiez avec votre kit de petit chimiste ? Vous ajoutiez des produits chimiques, les uns après les autres, pour voir celui qui finirait par déclencher une explosion.
Voilà ce qu’a fait l’Europe. Tout a commencé avec six [langues]. Cela n’a pas suffi, alors ils sont passé à neuf… rien. A dix, on a vu un peu de fumée. Douze… Quinze… Vingt-cinq, quelques bulles sont apparues. Vingt-sept… explosion !
Je suis absolument certain que Daniel Cohn-Bendit soutiendra que l’expérience européenne est un succès, car la paix règne en Europe depuis la création de l’UE. Pouvons-nous juste tordre le cou à cette idée ?
L’intégration européenne n’a absolument rien à voir avec la paix que connaît l’Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, une réussite qu’il faut attribuer à l’OTAN.
La création de l’Union européenne n’avait pas pour but la guerre ou la paix, auquel cas une communauté européenne de défense aurait été formée, une initiative à laquelle s’est opposée l’Assemblée nationale française en 1954.
Il faut juger l’Europe d’un point de vue économique, puisque c’est toujours en ces termes que l’organisation a été définie. (…) La croissance de l’Europe a décliné à mesure que s’est poursuivie son intégration.
Pouvez-vous me dire quels étaient les pires marchés boursiers au cours des 10 dernières années ? La Grèce, l’Irlande, l’Italie, la Finlande, le Portugal, les Pays-Bas et la Belgique – ces pays étaient même les pires à l’échelle mondiale. Et n’oublions pas non plus l’union monétaire, la plus grande des expériences ayant mal tourné.
L’expérience politique a aussi échoué. L’idée était de forcer les Européens – contre leur gré – à se lier plus étroitement par des moyens économiques, face à l’impuissance des moyens politiques.
Lorsque les peuples européens se sont opposés à une intégration plus poussée, et qu’ils n’ont pas donné la bonne réponse aux référendums, alors les gouvernements en ont tout simplement organisés de nouveaux.
On comprend mieux pourquoi cette expérience a échoué : l’UE est en échec parce qu’elle a perdu toute légitimité politique.
On peut le voir non seulement en Grèce, mais aussi dans les autres gouvernements européens. Treize d’entre eux sont tombés depuis le début de la crise il y a deux ans, et la tendance continuera de se poursuivre dans les mois à venir.
Les canadiens savent à quel point il est difficile de gérer un système fédéral composé de seulement 10 provinces et deux langues officielles.
L’expérience européenne, avec 27 pays et un nombre sidérant de 23 langues, s’est soldée par un échec infâme.