Le Point.fr s’est procuré “l’avant-projet de loi” du ministère de la Justice qui détaille les mesures envisagées par la réforme pénale. Vous avez dit laxisme ?
Le grand flou. La réforme pénale de Christiane Taubira doit être présentée en septembre en Conseil des ministres. Et rien n’est encore gravé dans le marbre. “Le travail autour de ce texte est encore en cours et fait toujours l’objet d’arbitrages”, explique la Chancellerie. Pour le moment, nul ne connaît encore la teneur exacte de la réforme. L’Union syndicale des magistrats (USM), le Syndicat de la magistrature (SM) et la CGT pénitentiaire, qui représente notamment les services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP), disent tous n’en “connaître que les grandes lignes”. Mais personne n’a eu accès au projet de loi complet. Le Point.fr s’est procuré le document présenté comme “Le projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines”. Il détaille les mesures que la Chancellerie souhaite prendre pour lutter contre la récidive et la surpopulation carcérale. Cet avant-projet de loi est la source du récent clash entre Christiane Taubira et Manuel Valls, qui a demandé un arbitrage de l’Élysée.
Nous vous en livrons les premières grandes lignes, qui concernent particulièrement la lutte contre la récidive.
– La sortie aux deux tiers de la peine. La situation des personnes condamnées à des peines de moins de 5 ans sera désormais “obligatoirement examinée (…) afin que soit prononcée une mesure de sortie encadrée”, explique le texte. La sortie se fera sous la forme d’une semi-liberté (la personne dort en prison), d’un placement sous surveillance électronique (PSE), d’un placement à l’extérieur ou encore, selon les cas, d’une libération conditionnelle. La libération automatique du prisonnier aux deux tiers de la peine devient donc un principe.
Si le JAP estime un individu dangereux, il pourra néanmoins prendre “une ordonnance spécialement motivée”, pour empêcher sa sortie. Mais Christiane Taubira va plus loin. Dans l’article 7 de l’avant-projet de loi, elle souhaite rendre “obligatoire” l’examen des longues peines (plus de cinq ans de prison) aux deux tiers de leur exécution, en vue d’une éventuelle libération conditionnelle. Ces mesures avaient été préconisées en janvier par le député PS Dominique Raimbourg, dans un rapport d’information sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale.
– Des réductions de peine pour les récidivistes. En matière d’aménagement et de réduction de peines, Christiane Taubira veut calquer le régime des récidivistes sur celui des non-récidivistes. Notre Code pénal prévoit en effet des réductions de peine “pour les condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale“. Pour les récidivistes, cette réduction ne peut excéder deux mois par année de prison ou quatre jours par mois lorsque la peine qui reste à subir est inférieure à un an. Christiane Taubira propose d’aligner ces délais sur ceux des non-récidivistes, à savoir trois mois et sept jours, sauf avis contraire du JAP.
– La peine d’emprisonnement en dernier recours. Lorsque le juge n’inflige pas une une peine de prison avec sursis, et qu’il choisit donc l’emprisonnement ferme, le Code pénal l’oblige à motiver sa décision. Cependant, lorsque la personne est récidiviste, il n’est pas obligé de le faire. Christiane Taubira souhaite faire disparaître cette possibilité.
– Suppression du mandat de dépôt obligatoire pour les récidivistes. La Chancellerie souhaite supprimer l’article 465-1 du Code de procédure pénale qui dispose : “S’il s’agit d’une récidive légale au sens des articles 132-16-1 et 132-16-4 du Code pénal, le tribunal délivre mandat de dépôt à l’audience, quel que soit le quantum de la peine prononcée, sauf s’il en décide autrement par une décision spécialement motivée.”
Le Point