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Le Parti socialiste a choisi comme principal thème de travail pour son université d’été la mobilisation contre l’extrême droite. Alors que la France connaît toujours de sérieuses difficultés économiques, et que les mois à venir s’annoncent chargés avec la question de la fiscalité et des retraites, comment analyser ce choix ? Le PS botte-t-il en touche pour éviter les problèmes qui fâchent ?
(…) Bertrand Rothé : Il est évident que le Parti socialiste botte en touche. Je pense que c’est la seule stratégie qui leur reste pour remobiliser leurs troupes. Il y a un parallèle intéressant dans le comportement des organisations qui ressemble à celui des individus, c’est de répéter tout le temps les mêmes stratégies. Le PS fait la même chose en usant de ce chantage à l’extrême droite, notamment parce qu’il n’ont aucune alternative. D’ailleurs, jouer sur l’extrême droite est une stratégie qui a pour l’instant fonctionné pour le PS, depuis l’origine de son instrumentalisation par François Mitterrand. L’histoire leur donne même raison : quand ont-ils échoué sur ce positionnement ? Peut-être y a-t-il aujourd’hui une partie de l’électorat qui décroche sur ce chantage, mais il s’agit d’un discours maîtrisé, et qui fonctionne encore bien auprès d’une certaine partie de l’électorat.
Le terme “extrême droite” reste souvent vague et le PS ne nomme pas précisément ceux qu’il identifie ainsi. Classiquement, pour le PS, qui est “l’extrême droite” ? Quels sont concrètement les positionnements politiques qui font, selon les sympathisants du PS, que l’on “mérite” ce qualificatif et comment cela a-t-il évolué ?
Thomas Guénolé : Classiquement, depuis le début des années 1980, l’extrême droite vue par le PS, c’est tout simplement le Front national.

C’est aussi, pour un parti dont nombre de cadres ont débuté à l’UNEF, la somme des groupuscules de l’ultradroite – le mouvement étudiant GUD, le Bloc identitaire, etc. – et les médias pureplayer de même obédience comme Fdesouche ou Riposte laïque.

C’est enfin l’aile de l’UMP que le PS accuse de “droitisation” : en d’autres termes la frange de l’UMP qui adhère à la ligne Buisson. Personnellement, je considère que le terme “droitisation” est inapproprié. Il y a plusieurs droites, de sorte qu’une droitisation par davantage de gaullisme n’a rien à voir avec une droitisation par davantage de libéralisme économique. Le terme approprié, d’un point de vue logique, est “frontisation” ou “lepénisation” : donc, par extension, “droite frontisée” ou “droite lepénisée”.
Bertrand Rothé : Grosso modo, je pense que ce terme d’extrême droite est surtout utilisé par le PS pour envoyer ses militants dans les quartiers populaires pour rappeler que ne pas voter PS cela “fera le jeu du Front national” dans l’espoir de mobiliser. D’ailleurs, cela devient même très compliqué à définir ce qu’est l’extrême droite pour eux depuis que des électeurs socialistes commencent, de manière significative, à voter pour le Front national au deuxième tour des élections, quand le PS est éliminé. Je pense que le Parti socialiste ne réfléchit même pas vraiment à ce qu’est précisément l’extrême droite aujourd’hui. Le Front de gauche aussi d’ailleurs. Ces partis ont souvent une vraie incapacité à penser précisément l’électorat du Front national. La représentation que les élites ont du FN ne démontre pas une grande réflexion. Quand on constate les travaux des universitaires qui travaillent là-dessus, on voit même que leur perception est complètement erronée, avec notamment le sentiment d’une surreprésentation du monde ouvrier qui est fausse. Si je me mets dans la tête d’un cadre du Parti socialiste je ne me poserais même pas toute ces questions. La réalité, c’est que le Front national ça fait encore peur, il faut donc en profiter car c’est tout ce qu’il reste pour faire voter PS.(…)
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