Alors que les inspecteurs de l’ONU ont commencé leur enquête sur les accusations de massacre à l’arme chimique près de Damas, le ministre des affaires étrangères, Laurent Fabius, a assuré sur Europe 1 que la France promet une «réponse proportionnée» et imminente. Pour Natalie Nougayrède, journaliste au Monde, il doit y avoir une “riposte”.
On peut critiquer le fait que la mort de centaines de Syrien tués à l’arme chimique “pèse” plus, au plan international, que celle de 100 000 Syriens victimes d’armes conventionnelles. Et pourtant le massacre de La Ghouta s’apparente à un “Srebrenica syrien”.
L’emploi d’armes chimiques à grande échelle par le régime syrien, le 21 août, dans un faubourg de Damas, ne fait guère de doute. Les déclarations successives venues de Paris, de Londres et de Washington convergent : c’est le constat unanime d’une utilisation d’armes de destruction massive au coeur de la guerre civile syrienne. Les cyniques ou pseudo-réalistes considérant que l’on n’en était plus à une atrocité près dans ce conflit auraient tort de minimiser la signification de ce tournant. […]
Ce qui vient de survenir en Syrie dépasse largement le seul cadre de ce conflit, et même le périmètre du Moyen-Orient. Car l’emploi d’armes de destruction massive signifie qu’un tabou est brisé. La crédibilité des pays occidentaux, qui avaient parlé à des degrés divers de “ligne rouge”, est en jeu. Pas seulement. C’est toute la perspective d’un XXIe siècle doté d’un minimum d’organisation internationale qui est aujourd’hui testée. […]
Ne rien faire reviendrait à donner un blanc-seing aux crimes contre l’humanité et à ruiner l’édifice de normes internationales élevé en rempart contre l’emploi d’armes de destruction massive. Le signal envoyé indirectement à l’Iran et à la Corée du Nord serait un message de laisser-faire.
Le Monde