Partout dans le monde développé, et en France en particulier, les crises économiques et les guerres sont gérées très différemment. Les guerres sont gérées simplement et efficacement : un but de guerre, un chef de guerre, un consensus national, une analyse des forces ennemies, une stratégie, des tactiques, des moyens. Et on voit alors les chefs d’état les plus indécis se transformer, au contact de leurs généraux, en stratège décidé.
Les crises économiques, au contraire, sont gérées, la plupart du temps en démocratie.
Sans but clair, sans consensus national, sans analyse des forces hostiles, sans stratégie, et avec des chefs indécis, multiples et contradictoires. En conséquence, l’histoire récente à montré que même ceux qui savent gagner les guerres de mouvement les plus difficiles s’enlisent dans des conflits économiques et sociaux sans fin.
De fait, les dirigeants en arrivent même à préférer entrer dans des conflits militaires plutôt que de faire des choix économiques.
De plus, par définition, les ennemis dans un conflit international ne sont pas des électeurs; aussi le pouvoir politique n’a aucune raison de les ménager.
A la différence de tous ceux qui, dans le pays, ont quelque chose à perdre dans toute reforme économique globalement salutaire.
On a plus de chance d’être populaire en se lançant dans un conflit que dans des réformes. Et, dans certaines circonstances historiques particulièrement tragiques, les peuples finissent même parfois par confier la gestion de la crise économique à des militaires.
En France, ce raisonnement s’applique parfaitement aujourd’hui : le président actuel de la République, comme son prédécesseur, semble plus à l’aise dans la gestion de crises militaires que dans celle de la crise économique.
Dans un cas, il décide avec lucidité et détermination de déclencher l’action d’une excellente armée, unie sous un même commandement, pour gagner une guerre avec l’approbation d’une majorité du pays. Ainsi fut fait récemment en Lybie , au Mali, en RCA.
Dans un autre, l’un comme l’autre n’ont pas osé trancher, réformer, avancer autant que nécessaire de peur de mécontenter tel ou tel groupe.
Si un chef de guerre cherchait à être le barycentre des forces de ses lieutenants, il serait certain de perdre toutes les batailles. Il en va de même pour la guerre économiques.
L’histoire nous apprend donc qu’un grand pays ne peut conduire de grandes réformes, pour juguler une crise économiques, que s’il emploie les mêmes moyens que ceux qu’il emploie pour mener un conflit armé :
Une analyse claire des forces en présence, un chef déterminé , un but de guerre clairement énoncé, la construction d’un consensus national aussi large que possible, sur ce but de guerre. Et l’analyse lucide des pertes tolérables.
On rêve donc aujourd’hui de voir reconnaître que nous sommes en guerre économique, des ministres unis, formant un véritable état major de crise autour de lui, agissant sans sourciller, autour d’un président déterminé.
Et qu’on ne dise pas que la gestion d’une crise économique est plus complexe que celle d’une guerre : Dans les deux cas, on met en jeu la vie d’hommes et de femmes, en affrontant des péripéties parfois dramatiques et changeantes.
Il faudrait donc apprendre combattre la crise avec la même détermination, la même absence de recherche de popularité, avec le même décorum, la même mise en scène, le même vocabulaire que le combat contre un ennemi de l’extérieur.
Dans les deux cas, la patrie est en danger.