L’information parue dans la presse belge en milieu de semaine semblait alarmante : aucune naturalisation en 2013. Si la loi a changé, les Marocains conservent, par une autre procédure, la possibilité d’obtenir, de droit, la nationalité belge.
« Pas une seule naturalisation en 2013, sous la nouvelle loi », titrait LaLibre.be, mardi 17 décembre. « Quarante fois moins de demande de naturalisations en 2013 », ajoutait le Soir. Selon la presse belge, aucune naturalisation ne sera accordée cette année par les parlementaires belges sur les 508 dossiers introduits au 30 novembre 2013, contre 4 838 naturalisation sur un total de 18 731 l’an dernier.
La nouvelle loi sur l’acquisition de la nationalité est entrée en vigueur le 1er janvier et a profondément modifié le paysage. Hors, la première communauté de nouveaux belges, chaque année, depuis longtemps est constituée par les Marocains. Ils représentent près de 20% des ceux qui obtiennent la nationalité belge. Ils devraient donc être les premiers touchés par cette réduction drastique des naturalisations, n’eût été « l’acquisition de la nationalité ».
« Il y a deux façons d’obtenir la nationalité belge : par l’acquisition de la nationalité et par la naturalisation. La réforme a touché la première procédure, pour rendre à la seconde son rôle de voie exceptionnelle pour devenir belge », explique Jean-Michel Lafleur, directeur adjoint du centre d’études de l’ethnicité et des migrations, spécialiste de la participation politique des migrants. L’acquisition de la nationalité est une procédure administrative, tandis que la naturalisation est accordée par le parlement belge lui-même.
« C’est une évolution qui va dans le bon sens, estime Georges Dallemagne, le président de la commission des naturalisations de la Chambre belge. Ce n’est pas le rôle des parlementaires d’examiner des dizaines de milliers de demandes de naturalisation chaque année, sauf à quelques exceptions près[…] »
« La procédure administrative est un droit, si un individu rempli les critères objectifs qui lui sont demandé, l’Etat belge ne peut pas lui refuser la nationalité belge. Le parlement, comme dans l’essentiel des pays d’Europe, n’attribut la nationalité qu’à des personnalités exceptionnelles en dehors des critères officielles », comme une faveur, indique Jean-Michel Lafleur. Jusqu’en janvier 2013, la procédure administrative était si longue et si complexe, que les étrangers étaient incités à présenter plutôt leur dossier au parlement plutôt qu’à l’administration.
La nouvelle loi a revu la procédure administrative pour accueillir, désormais l’essentiel des demandes de nationalité « on devrait donc voir un report du nombre de demande de nationalité du parlement vers l’administration », conclut Jean-Michel Lafleur. Cependant, il est probable que le nombre de nouveaux Belges baisse, car la loi a aussi durci les conditions d’acquisition de la nationalité : 5 ans de résidence plutôt que 3 et la connaissance de l’une au moins des deux langues nationales sont requis. « La loi a ainsi rendu la décision finale beaucoup plus prévisible et plus juste car avant la marge de manœuvre des élus était telle que les décisions d’octroyer ou non la nationalité devenaient arbitraires », estime le chercheur.
L’une des conditions requises pour obtenir la nationalité par la procédure administrative reste cependant très floue. Un étranger qui demande la nationalité belge doit faire preuve de son intégration en Belgique. « La dessus, la loi est très floue. Elle dit simplement qu’un diplôme, une formation professionnelle, ou avoir travaillé 5 ans sont des preuves d’intégration. Un chômeur longue durée aura donc du mal à obtenir la nationalité », signale Jean-Michel Lafleur.