Les Espaces d’Abraxas, construits par l’architecte Ricardo Bofill entre 1978 et 1983 à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), devaient incarner une alternative aux grands ensembles de logements de l’après-guerre, considérés, depuis la seconde moitié des années 50, comme peu conformes aux aspirations des habitants.
Comme tous les résidents du Palacio, Alain et Jacqueline Té ont condamné la fenêtre de leur cuisine qui donne sur la cour intérieure, pour prévenir les cambriolages. «Si j’avais su qu’il allait y avoir des logements sociaux, je n’aurais pas acheté ici», conclut-elle.
D’autres photos de l’ensemble.
Parmi les surnoms donnés au Palacio : “Alcatraz” ou “Gotham city”.
Dans un espace restreint, l’architecte espagnol Ricardo Bofill a imaginé une «utopie» fermée et constituée de 610 logements répartis dans trois bâtiments – malgré la circulaire «barres et tours» de 1973, qui interdit de confier à un seul architecte plus de cinq cents logements.
Comment décririez-vous votre expérience en France, où vous avez réalisé plusieurs œuvres dans la foulée des Espaces d’Abraxas ?
Mon expérience en France est en partie réussie et en partie ratée. Réussie car j’ai fait évoluer le système d’architecture français qui était jusqu’alors très classique et parce que j’ai mis au point la technique du préfabriqué. Ratée car quand on est jeune on est très utopique, on pense qu’on va changer la ville et finalement rien ne s’est passé. Je n’ai pas réussi à changer la ville. […]
Dans le cas précis des Espaces d’Abraxas, qu’avez-vous raté selon vous ?
Il s’agit d’un espace unique qui a pâti du manque d’esprit communautaire propre à la France : les populations ne se sont pas mélangées. Mais les Espaces d’Abraxas ont été abandonnés : à l’époque, on disait que pour que ça marche il fallait y faire vivre au maximum 20 % d’immigrés, afin de réussir à réellement mélanger les populations. Ça n’a pas été appliqué. […]
Le Monde 1; 2